Préambule
En février 2018, nous avions publié dans le Flyer 70, un article sur les nouvelles formes de buprénorphine qui arrivent bientôt sur le marché des médicaments de substitution opiacée (MSO) et pour lesquels 2019 et 2020 devraient marquer l’avènement ou entrainer une cruelle désillusion.
Les formes dont on parle le plus sont les formes dépôt, Buvidal© et Sublocade©, qui mobilisent quelques-uns de nos lecteurs engagés dans des ‘boards d’experts’ pour aider les firmes, respectivement Camurus et Indivior, à trouver leur place sur ce marché des MSO.
Rappelons que ces médicaments permettent une injection sous-cutanée de buprénorphine pour une semaine (Buvidal©) et 1 mois (Buvidal© et Sublocade©) mais que pour l’instant, ils sont encore dans le processus d’évaluation pour obtenir le remboursement et le prix. Au niveau européen, Camurus semble en avance sur Indivior et pourrait mettre le médicament à disposition en fin d’année 2019.
Aux USA, à l’inverse, Inidvior a déjà mis sur le marché Sublocade© avec, semble-t-il, de grandes difficultés à faire utiliser cette modalité d’administration de la buprénorphine.
Référence : PharmaLive.com. INDIVIOR SLASHES 2018 REVENUE OUTLOOK FOR SUBLOCADE, SEPTEMBER 26, 2018/BY REUTERS HEALTH
Mais nous y reviendrons plus tard, ce sera probablement l’acte 3 de la série « Bupréland », dès que ces formes seront mises sur le marché et que nous aurons les premiers retours des utilisateurs.
En attendant, voyons ce qu’il se passe avec Orobupré©, mis sur le marché à bas bruit par la firme Ethypharm fin 2018, qui est plus connue dans le milieu de l’addictologie pour être celle qui développe un médicament à base de baclofène (Baclocur©) avec une AMM obtenue en septembre. C’est elle-aussi qui devrait diffuser le kit de naloxone par voie IM, Prenoxad©, qu’on nous annonce à prix bas (19,00 euros) et disponible partout, y compris dans les pharmacies d’officine.
Orobupré©, mieux ou moins bien ?
Il est probablement un peu tôt pour se prononcer définitivement sur l’apport de cette nouvelle forme de buprénorphine dans la palette des MSO. Un peu plus de recul et de témoignages d’usagers et de cliniciens seront nécessaires pour confirmer ou infirmer les premières observations.
Pour autant, nous avons interrogé quelques-uns de nos correspondants pour avoir leur avis sur Orobupré©.
Le Dr Jonathan Bara du CSAPA Sato-Picardie à Beauvais a été le premier à décrire parfaitement un switch de Subutex© vers Orobupré© :
« C’est une patiente qui est sur la fin de sa quarantaine, sous buprénorphine depuis déjà plus de 10 ans et qui n’a expérimenté l’héroïne que sur une très courte période en forme nasale. Aucun risque actuel d’injection et jamais de mésusage de sa buprénorphine. Elle a à côté une appétence déplacée sur les benzodiazépines (comme c’est malheureusement souvent le cas) mais à des doses acceptables et restant dans les AMM. Elle ne prend pas de produit illicite à l’exception de quelques joints de THC occasionnellement. Un jour à l’occasion d’une consultation, elle m’exprime sa grande difficulté à l’observance du maintien en sublingual de sa buprénorphine tous les jours. Elle est à 8 mg. L’Orobupré venant juste de sortir (on est fin novembre) je lui en parle car elle semble ne pas présenter de contre-indication (pas d’antécédent d’injection, pas de mésusage, bonne compliance). Elle semble intéressée par cette possibilité de raccourcir l’absorption à 15 secondes sous la langue. Je lui explique la nécessité de retitrer en ne considérant pas que 8 mg de buprénorphine correspondront à 8 mg d’Orobupré. Je lui mets donc à disposition une ordonnance de 6 mg (par comprimés de 2 mg) le premier jour avec malgré tout la possibilité de monter à 8 mg en cas de manque (et au vu du faible risque de surdosage avec un agoniste partiel à ce dosage-là). Selon ce protocole, elle prendra 6 mg le premier jour. Nous avions convenu d’un contact téléphonique le lendemain pour la rassurer et moi m’assurer que cela se passe bien (car nous avons effectué ce changement en fin de semaine). Le J1 se déroulera sans aucun problème particulier. Je la revois le lundi suivant, le switch s’est bien passé avec une bonne observance, une tolérance normale et une nette amélioration de sa qualité de prise (ce qui est l’objectif principal du changement chez elle). Malgré tout il lui a fallu monter à 8 mg d’Orobupré dans le week-end. Elle est depuis à 8 mg d’Orobupré ce qui correspond à son dosage de BHD. L’équivalence de posologie laisse à penser qu’elle devait soit avoir une bonne biodisponibilité de la BHD, soit une excellente observance du mode de prise (soit les deux). »
Quelques semaines plus tard, le Dr Jonathan Bara nous informe que sa patiente a baissé sa posologie à 6 mg/jour, en raison d’une sensation de surdosage (sédation, asthénie) après la prise d’Orobupré, ce qui semble confirmer la meilleure biodisponibilité annoncée dans les études publiées.
Référence : Katherine A. Lyseng-Williamson, Buprenorphine oral lyophilisate (Espranor®) in the substitution treatment of opioid dependence: a profile of its use, Drugs & Therapy Perspectives volume 33, pages 241–248 (2017)
Ces sensations de surdosage post-prise nous ont été confirmées par la Dr Pierre Masseron, médecin généraliste à Toulouse, qui a mis une dizaine de patients sous Orobupré©. Dans 2 cas, ses patients ont décrit un endormissement brutal. Pour l’un d’entre eux, la posologie est passée de 16 mg/jour en sublingual à 6 mg/jour d’Orobupré©. Les patients avaient été switchés sans baisse de la posologie…
Ces 2 témoignages confirment la nécessité de baisser la posologie d’Orobupré© en cas de swicth d’une forme sublinguale (Subutex© et ses génériques, Suboxone©) vers cette forme orodispersible. C’est d’ailleurs ce qui est exprimé dans les documents officiels et mentions légales de cette nouvelle forme : « Ces différents médicaments ont une biodisponibilité différente. Par conséquent, la dose en mg peut varier entre les produits ».
Mais tout n’est pas si simple.
Le Dr Véronique Vosgien de Lille nous a elle-aussi communiqué son expérience.
« J’ai switché 4 patients sous buprénorphine sublinguale et réalisé une induction pour un nouveau patient. Un seul sur les 4 switchs est revenu à la forme sublinguale sans vraiment de motifs évidents, il a incriminé le temps d’attente avant déglutition …ce qui veut dire qu’il prend très mal la buprénorphine sublinguale, Je lui ai donc fait remarqué mais a voulu rester à la forme sublinguale… soit ! Pour les autres pas de problème particulier, au contraire : confort de prise et meilleur goût. Pas de notion de surdosage avec la même posologie pour les patients qui avaient switché. »
A propos de l’interchangeabilité !
Nous avions identifié assez rapidement cette différence de biodisponibilité et mis en exergue la notion d’interchangeabilité qui s’est révélée au grand jour avec la mise sur le marché d’Orobupré© dans un article publié dans le Flyer 74 en février 2019, précédé d’un e-dito dès décembre 2018.
« Cette affaire d’interchangeabilité a traduit dans les faits une problématique déjà soulevée précédemment, celle de la biodisponibilité de la buprénorphine sublinguale. Selon le respect du temps de dissolution sous la langue (10 minutes), la déglutition de salive pendant ces 10 minutes (c’est quasiment impossible de ne pas déglutir pendant tout ce temps), la biodisponibilité peut varier considérablement (extrait des mentions légales : « Par voie sublinguale, la biodisponibilité absolue de la buprénorphine est mal connue, mais a été estimée entre 15 et 30 % »). C’est variable d’un individu à l’autre, mais également chez un même individu d’un jour à l’autre car il respectera les consignes de prise de façon inégale selon le temps dont il dispose pour prendre sa buprénorphine sublinguale. »
En clair, il est bien sûr parfaitement possible de changer de forme de buprénorphine, pour un patient en quête de confort de prise ou de gain de biodisponibilité, et cela dans tous les sens, sublingual vers orodispersible ou l’inverse. Mais, cela doit nécessiter une nouvelle recherche de la posologie optimale, celle avec laquelle le patient se sent ‘confortable’ sans signes de sur- ou sous-dosage. Mais dans certains cas, la posologie restera la même.
Dans tous les cas, un switch d’une forme de buprénorphine vers une autre est une bonne occasion pour challenger la posologie de buprénorphine.
- Est-ce la bonne posologie ?
- Doit-elle être maintenue en l’état ou adaptée au plus près de ses besoins ?
- Qu’en est-il réellement de la prise de buprénorphine sublinguale ?
- Est-elle efficiente ?
En réalité, quand on échange avec nos patients, force est de reconnaitre qu’ils sont fort peu nombreux à garder 10 minutes leurs comprimés sous la langue. Un certains d’entre nombre d’entre eux avalent assez rapidement leurs comprimés et beaucoup n’ont jamais été réellement informés des modalités de la prise sublinguale, des 10 minutes sous la lange sans déglutir, alors qu’ils sont sous Subutex© depuis 20 ans !
Le confort de prise
Indéniablement, c’est sur le confort de prise, grandement lié à la dissolution en 15 secondes du comprimé d’Orobupré© sur la langue, que nous attendions cette nouveauté.
Globalement, tous les témoignages de nos correspondants soulignent ce confort de prise amélioré que la HAS avait signalé dans l’avis de la Commission de Transparence : « La place d’Orobupré© 2 et 8 mg dans la stratégie thérapeutique est la même que celle de Subutex© 2 et 8 mg. De plus, étant donné le temps de dissolution plus rapide, OROBUPRE peut permettre un confort d’utilisation et peut représenter une option utile autant pour les usagers que pour les équipes soignantes lors d’une prise supervisée. »
Mais bien sûr, en matière de goût, chacun a ses préférences et ses habitudes. La menthe d’Orobupré©, si elle peut être agréable pour certains, peut déplaire à d’autres.
Il semblerait également que le temps de dissolution « trop rapide » puisse déstabiliser certains usagers qui sont dans quelque chose qu’on pourrait qualifier de « rituel de dissolution lente » avec la forme sublinguale, appréciant la sensation d’imprégnation progressive en 10 minutes.
Comme nous l’avions indiqué dès février 2018, dans l’article « Buprénorphine, de nouvelles formes arrivent à la conquête de Bupréland », l’attachement des usagers à ce bon vieux Subutex© est important et le changement, en soi, même avec un bénéfice perceptible a priori, est une étape difficile à franchir, surtout si tout va bien ! Notre avis, dans l’article de février 2018, semble toujours valable : Orobupré® pourrait être un progrès, certes relatif, dans l’arsenal des MSO ! Depuis 1996, rien n’a été fait pour le confort des usagers en matière de prise orale de buprénorphine. Les firmes ont mis sur le marché des génériques supposés faire baisser les coûts de traitement ou, dans le cas de Suboxone®, un médicament supposé limiter le risque d’injection de buprénorphine. Ces solutions n’avaient aucun avantage tangible pour nos patients. En améliorant le confort de prise et la biodisponibilité de la molécule, Orobupré® pourrait prendre une place dans le paysage français des MSO. Probablement modeste, notamment en raison d’un très fort attachement des usagers à la « marque » Subutex®.
Nous avons également trouvé des témoignages courts de professionnels de santé sur Facebook ou plus long par Messenger ou par mail.
Celui du Dr Phuc NGUYEN de Roanne :
« Très bon retour de mes patients concernant Orobupré, meilleur goût, dissolution plus rapide et meilleure biodisponibilité confirmée. Je valide »
Du Dr Céline JEHANNE de Lisieux :
« Pour résumer, j’ai testé sur 6 patients : 5 n’ont pas voulu changer (1 femme m’a décrite une sensation de langue anesthésiée après la prise et a préféré continuer sa buprénorphine générique). J’ai mis 2 patients sous Orobupré© en attendant une possible induction méthadone et, au final, les deux ont souhaité annuler la mise sous méthadone. Leur argument : facilité et rapidité de la prise (un a essayé de sniffer et me dit que vu le comprimé c’est plutôt très compliqué) et le goût est mieux supporté. J’ai mis un autre patient car il voulait son Subutex© en non substituable et je n’avais pas de raison médicale (et il ne voulait pas avancer le tiers payant). Au final, il en est plutôt content, prise beaucoup plus rapide et meilleure tolérance gustative. Le dernier patient, je lui ai proposé suite à une mise sous TSO dans un contexte de surconsommation d’antalgique opiacé. Il est très content de la prise rapide, le goût est aussi bien accepté.
Je viens aussi de le commencer sur un 7ème patient qui sniffait sa buprénorphine et continuait des prises régulières d’héroïne. Il en est content mais c’est une mise sous traitement depuis 14 jours. Pour tous, j’ai fait une mise en place de traitement avec délivrance et prise sur place à la pharmacie au moins la 1ère semaine. »
Et celui du Dr Philippe MERLIN de Nancy :
J’ai proposé le traitement par Orobupré© à 16 patients traités précédemment par Subutex©, Suboxone© ou BHD générique sans changer le dosage.
11 d’entre eux ont adopté le traitement dès la première prescription et ne souhaitent plus revenir en arrière. Ils mettent essentiellement en avant une prise simplifiée, plus rapide et un goût moins amer. Pour 8 d’entre eux, il n’y a pas eu de difficultés. Les 3 autres ont décrit des sensations de manque ou d’inconfort de courte durée.
4 autres patients ont souhaité revenir à leur ancien traitement. 2 étaient sous Subutex©, un sous Suboxone et le dernier sous buprénorphine générique.
Chez 1 autre patient qui prend une partie de son traitement en sniff, j’ai remplacé avec son accord, une partie de la dose antérieure par Orobupré©. Lors du renouvellement suivant, il a souhaité continuer de cette façon. Il est actuellement à 8 mg de Subutex© et 8 mg d’Orobupré©.
Il apparaît que sur les 11 patients qui ont gardé Orobupré©, 7 ont un environnement socioprofessionnel favorable. Alors que les 4 qui ont souhaité reprendre leur traitement antérieur ont des conditions de vie précaires: tous sans emploi. 3 d’entre eux sont isolés socialement.
Qu’en disent les usagers ?
Nous avons trouvé de nombreux témoignages sur le site Psychoactif. Plusieurs d’entre eux en faveur d’un meilleur confort de prise et d’un gain de temps lié à la dissolution rapide.
M en novembre 2018 :
15 secondes sur la langue, c’est mieux que d’attendre que ça fonde bien sous la langue.
C’est long si je me souviens bien, faut s’appliquer longtemps pour garder ce qui devient une pâte sous la langue.
Les usagers auront les patchs et les suppos avant une formulation injectable…
L, le 07 novembre 2018 :
Apparemment il manque encore les posologies plus basses (pas de 0.4mg, 1mg, 4mg et 6mg pour le moment, il n’y a que 2mg et 8mg actuellement).
Mais franchement pour moi je trouve que c’est une bonne chose.
Perso si j’ai pris mon sub à l’époque en sniff c’était parce que le garder 10min en sublingual me filait la gerbe.
Avec cette forme, 10 secondes ça doit passer.
C en novembre 2018 :
Je suis très intéressé par Orobupré, étant très incommodé par le temps que me prends la prise du Sub en sublingual au taf ou chez moi, où je dois m’isoler pour que personne ne me parle au risque de devoir tout avaler… sans mauvais jeu de mot…
P en janvier 2019, retour d’un mésusage par voie IV
Alors je viens faire mon petit témoignage sur l’Orobupré.
J’utilise de façon détourné du Sub (non générique) depuis presque 8 mois, à raison de 2 injections par jour de 2x2mg, soit 8 mg/j.
Je ne shoote que sur les mains ou sous les poignets, pour éviter d’attirer l’attention sur les creux du coude, emplacement que tout le monde dans ta famille surveille quand t’as été tox un jour, même si ça fait 25 ans que t’as officiellement arrêté.
En plus, je ne peux pas me permettre que quelqu’un à mon boulot remarque quoi que ce soit, trop d’enjeux.
Et depuis quelques semaines je commence à avoir des difficultés, entre le froid qui rétrécit les veines et le fait qu’elles commencent à souffrir des produits.
Je fais pourtant très attention à la préparation habituellement : tout sur champ stérile, mains propres et gel désinfectant, matériel neuf et stérile et surtout filtre toupie et eau injectable neuve.
Je change d’aiguille dès que ça marche pas du premier coup ou presque, pour pas tout abimer.
Et je change de point d’injection pratiquement à chaque fois, donc il se passe toujours mini 48h ou plus avant que je ne revienne sur la même veine.
Je sais … au bout de 8 mois ça fait plus trop la différence, et je le vois bien.
Alors j’ai voulu tenter l’Orobupré en injection. Je me suis dit qu’un truc facilement dissout, ça voulait dire moins d’eau, moins d’excipient, etc … donc plus propre dans mes veines.
J’ai demandé à mon addicto de me mettre 3 semaines de sub et 1 0robupré pour tester.
Alors déjà, à la préparation, j’ai trouvé qu’il y avait comme un bizarre « film gras » sur la solution, ça ne se dissout pas parfaitement. C’est un peu visqueux et ça pue la menthe.
La première fois j’avais testé avec seulement 2 cp de 2 mg donc ça allait niveau du filtrage, mais la seconde fois j’avais mis 3 ou 4 cp et là, le côté « gras et visqueux » a littéralement bouché mon filtre toupie. il m’a fallu en utiliser 2 avant de pouvoir récupérer toute la solution. Pour seulement 2 cc de liquide.
De plus à partir de 3 ou 4 cp, ça ne se dissout plus complètement dans le même volume de liquide. Cela laisse de petits amas de résidus bizarres, qui flottent et semble très volatils, mais qui persistent dans l’eau même après 2 mn.
Ensuite l’injection elle-même. La première fois j’avais rien remarqué mais je ‘avais faite exceptionnellement à un endroit peu utilisé, le creux du bras, (je le fais là quand je suis pressée, pour être sure d’y arriver vite et bien) et donc c’était bien passé.
Mais la fois suivante, sur la prise de 6 ou 8 mg, je l’ai injecté dans la petite veine sous le poignet. Et là sensation de brulure assez intense dans la veine, et la main qui est devenue un peu violette.
Pas de gonflement, mais une couleur bizarre, comme si le sang circulait mal. Pas de douleur particulière à part la brulure au début. C’est passé après 5 mn.
J’ai recommencé une troisième fois, et là sur le dessus de la main, c’était deux jours après. Même chose, la main qui bleuit et la qui prend un couleur bizarre, avec les tous petites vaisseaux de la paumes et des doigts qui ressortent presque bleu fluo.
Après ça j’ai repris du sub et je n’avais pas ces symptômes.
J’ai refait une dernière tentative et encore la même réaction. J’ai arrêté parce que a me semble pas bon de continuer.
J’ai voulu partager ça, au cas où d’autres l’aurait remarqué ou se seraient posé la question, car peut être cela pourra éviter à certains de faire une mauvaise expérience.
Maintenant pas sûr que ce soit le prod, peut-être que mes veines sont nases, que mes mains refusent de subir cela plus avant.
Peut-être que c’était un concours de circonstances, mais quand même … avec le sub cela ne me le fait pas et je l’ai eu à chaque fois que j’ai injecté l’Orobupré dans les mains.
Et vu comment je procède je ne crois vraiment pas qu’il y ait eu poussière (pas de symptôme après), ni de saleté autre. Sauf si chacun des filtres était abimé, mais ça fait beaucoup trois de suite.
Sur la langue, et en dehors du fait que le goût de menthe est dégueu pour moi, c’est vrai que c’est rapide et bien mieux que le sub. Mais là aussi j’avais comme des picotements légers, comme s’il y avait un peu de piment … lol vous allez rire, mais c’est vrai.
Ou alors j’étais influencée par l’expérience négative de l’injection. J’ai commencé de suite par l’injecter avant de le gouter, j’avoue …
Du coup si je dois choisir, je garde le sub en injection et je valide Orobupré en absorption par la bouche.
Voilà c’était ma (longue) contribution du soir, en espérant que ça pourra servir.
P en décembre 2018, interpelle sur l’absence de dosages intermédiaires
En fait, ça se passe plutôt bien j’en suis très content. Le gain de temps est considérable! On dirait que ça monte plus vite. C’est effectivement légèrement plus fort. Je le mets SUR la langue il ne faut pas le mettre ailleurs.ni dessous ni sur les cotés, ça a un gout mentholé vraiment pas désagréable comparé au sub classique! Je ne pense pas qu’on puisse le mettre en poudre, j’ai un gros doute. Après je ne pratique pas ce mode de conso mais je sais pas comment expliquer la forme tous ne va pas, la texture du truc c’est bon à mettre sur la langue quoi, puis hop ça fond, ça monte..bref pour ma part je le coupe quand même en deux. Peut-être je passerais a 4 mg c’est un peu dommage..
Content de voir que vous été toujours réactifs! Je pense qu’ils sortiront d’autres dosages si ça marche bien ! Et j’ai rien payé c’est tout remboursé !
U en novembre 2018, expérience contrastée mais gain de temps indéniable !
Je viens de passer cette semaine à l’oropubré, je suis à 24mg mais j’étais à 24 en bupré classique avant. J’ai pas assez de recul pour apporter un témoignage sur le passage à l’orobupré, d’autant que ça correspondait à l’arrêt d’un « extra » d’une semaine à l’H, et que j’ai repris de la bupré beaucoup trop tôt (6h après mon dernier shoot d’héro..) Du coup j’me suis tapé une crise de manque foudroyante et carabinée (j’avais oublié qu’il fallait attendre d’être bien en keux avant de reprendre la bupré.. à ma décharge ça faisait plus de 10 ans que j’avais pas retapé de la came.. mais là j’risque plus d’oublier!!) Tout ça pour dire qu’au bout de 5 jours je recommence juste à sentir un peu l’effet de l’Orobupré (hormis que j’ai plus du tout de symptômes de manque depuis deux jours..) mais c’est pas le bien-aise total non plus. Du coup je vais attendre une semaine ou deux pour vous dire exactement ce que je pense de l’Orobupré ; en attendant, déjà effectivement ça fond en 30 sec sur la langue, et faut pas avaler pendant 2-3min. Déjà ça, ça change tout!! C’est vachement plus pratique, plus besoin de me lever 30 min plus tôt avant d’embaucher, pour le reste, mon ressentit, je vous en dirais plus d’ici une ou deux semaines.
Orobupré©, pour qui ?
Ce nouveau médicament dans la palette des MSO n’a pas officiellement d’indication spécifique par rapport aux formes sublinguales de buprénorphine haute dosage. Mais les témoignages recueillis auprès des professionnels de santé et des patients eux-mêmes permettent de décrire quelques situations-types dans lesquelles Orobupré© pourrait être proposé ou à l’inverse évité :
Sans aucun doute :
- Tout patient se plaignant de la prise sublinguale de buprénorphine (goût, temps de dissolution…) ou peu favorable à cette prise sublinguale en raison de la gêne qu’elle occasionne
- En cas de délivrance supervisée, l’intérêt de cette forme parait évident
- Des patients addicts aux antalgiques pour lesquels Orobupré© est moins ‘connoté’ que Subutex©
A discuter au cas par cas :
- Des patients en attente d’un traitement par la méthadone, et n’ayant pas ‘profité’ du potentiel de la buprénorphine, pour des raisons de manque d’absorption lié à la forme sublinguale (les 2 cas du Dr Jehanne sont assez intéressants à cet égard)
- Pour des patients sniffeurs, souhaitant renoncer à cette pratique mais soucieux d’avoir une bonne disponibilité de la buprénorphine (ce qui a pu les conduire au sniff)
- Les patients sous buprénorphine sublinguale, à des dosages élevés, pour lesquels l’absorption de buprénorphine mérite d’être questionnée (la prise sublinguale est-elle bien respectée ?)
- Les non-répondeurs à une forme sublinguale de buprénorphine, ne souhaitant pas un traitement par la méthadone
A éviter :
- Les injecteurs de Subutex© ! Il semblerait que, selon les témoignages, l’injection soit douloureuse avec des sensations de brûlure, probablement en lien avec la présence de menthol. L’avantage de la dissolution rapide et l’absence de talc ou amidon de maïs auraient pu laisser penser à un intérêt en termes de RdR pour les injecteurs. Le souci de rendre cette forme acceptable par voie orale a contrarié cette aspiration… La méthadone semble être la meilleure option pour les injecteurs, à condition qu’ils en soient demandeurs.
- Les sniffeurs qui veulent continuer cette pratique. Là-aussi, les témoignages sont concordants. Il est très difficile de transformer le lyophilisat en poudre.
- Les patients qui sont ‘bien’ avec Subutex© ou génériques, avec une prise sublinguale correcte et qui ne comprendrait pas un changement de traitement…
- Les patients sans complémentaire ni mutuelle, Orobupré© ayant eu un SMR modéré, il n’est remboursé qu’à 30% au régime général, mais cela ne concerne que quelques patients.
La diffusion d’Orobupré©
La facilité avec laquelle nous avons obtenu des témoignages de nos lecteurs laisse penser que ce nouveau MSO est d’ores et déjà prescrit de façon courante. La firme que nous avons interrogée n’a pas souhaité nous communiquer ses ventes, probablement pour des raisons ‘concurrentielles’.
Si on compare avec la diffusion de Suboxone© qui a mis plusieurs années avant d’atteindre un plafond de 2 à 3 000 patients (et pour lequel il est très difficile d’obtenir des témoignages), le sentiment est que ce médicament, rendant un service en termes de confort de prise et de biodisponibilité, devrait connaitre un succès ‘commercial’ plus marqué que Suboxone©.
Mais rien n’est écrit à Bupréland, le pays où Subutex© est roi !
En guise de conclusion
L’arrivée d’un nouveau médicament de substitution opiacée est toujours bienvenue. Ces MSO s’adressent potentiellement à plus de 150 000 patients et disposer de plusieurs options de traitement pharmacologique est un avantage en soi.
Cette mise sur le marché d’Orobupré© a remis au goût du jour la question de la faible biodisponibilité de la buprénorphine, notamment par voie sublinguale, avec des taux d’absorptions faibles et variables selon les individus et les modalités de prise qu’ils observent.
Si le gain de biodisponibilité semble tangible, au regard des témoignages que nous avons recueillis et des données de la littérature, reprises dans l’avis de la HAS , c’est surtout l’amélioration du confort de prise qui se manifeste le plus auprès des patients concernés.
Devant le constat que de très nombreux patients ont une prise non conforme de buprénorphine sublinguale, [certains l’avalent directement], en lien avec l’inconfort de la prise sublinguale, la mise en place d’Orobupré© permet de ‘challenger’ à la fois la posologie et les modalités de prise et faire le point sur le traitement par buprénorphine : est-il correctement pris ? la buprénorphine est-elle adaptée ? un changement de forme peut-il induire des changements positifs ?… Y compris pour des patients suivant un traitement depuis des années et où la question de la prise n’a jamais été posée…
S’il est globalement plus prudent de baisser la posologie, pour les switchs buprénorphine SL vers Orobupré©, il est possible que dans certains cas, la posologie finale soit la même. Mais la tendance est quand même à une posologie plus basse après la titration, surtout si la prise en sublinguale (10 minutes sous la langue, sans déglutir) n’était pas respectée.
Les cas de sniffeurs de Subutex©, parce que cela leur parait une alternative à la mauvaise biodisponibilité par voie sublinguale, est intéressant (ou parce que cela paraissait impossible de garder un comprimé sublingual 10 minutes sous la langue). Si le sniff de Subutex© est certainement plus fréquent que l’injection, tout en suscitant moins d’émois, il n’en reste pas moins un mésusage, auquel certains patients souhaitent mettre fin. Dans ce cadre, un essai d’Orobupré© sur quelques jours peut être une bonne option.
Ceux qui pouvaient penser que ce nouveau de médicament de substitution avait une voie toute tracée pour les mésuseurs, et en particulier les injecteurs, compte-tenu de sa dissolution ultra-rapide, seront déçus. Orobupré© semblent plus adapté pour les patients prenant correctement leur traitement et souhaitant améliorer leur confort de prise. Les cas d’injections douloureuses avec sensation de brûlure devraient dissuader rapidement les injecteurs de ‘tester’ Orobupré.
Si cela se confirme, la présence au marché noir d’Orobupré© devrait être limitée, comme cela fût le cas pour les génériques. Mais les ressorts du marché parallèle sont imprévisibles.
Quant aux sniffeurs qui veulent continuer cette pratique, ils sont vraisemblablement ceux qui retournent à Subutex©, plus facile à réduire en poudre qu’Orobupré©. La solution d’une prescription mixte, Subutex© + Orobupré© pour faire reculer progressivement le sniff, mise en place par certains confrères, mérite d’être tentée.
Par ailleurs, la peur du changement reste un frein au switch sublingual vers Orobupré©, plus encore chez les patients que chez les médecins. Certains confrères qui prescrivent Orobupré© font une deuxième ordonnance de Subutex© ou génériques pour rassurer leurs patients. Cela met à mal la notion de non-interchangeabilité mais permet un switch en douceur.
Enfin, l’absence de petits dosages (1 mg ou 0,4 mg, voire 0,2 mg pour les fins de traitements) est un handicap pour Orobupré©. Souhaitons que la firme ne se repose pas sur ses 2 seuls dosages ! Mais, en attendant, il est possible de co-prescrire des bas dosages de buprénorphine SL avec Orobupré© pour être au plus près de la posologie optimale, propre à chaque patient. C’est toujours ça de pris, si une partie des médicaments est plus confortable à prendre. Les AMM l’autorisent !
Liens d’intérêt : Dans le cadre de cet article, les auteurs n’ont aucun lien d’intérêt avec les firmes concernées par les médicaments citées (Camurus, Indivior, Ethypharm, Bouchara-Recordati et firmes commercialisant des génériques de buprénorphine).