Une équipe australienne (R Hallinan , A Byrne) et une équipe suisse (CB Eap, JJ Deglon) ont évalué dans le cadre d’un protocole commun, avec des techniques comparables, l’impact de la consommation de tabac, alcool, benzodiazépines (BZD) et cannabis sur les taux plasmatiques de méthadone.
Les taux plasmatiques de (R)- et (S)- méthadone ont été mesurés 24 heures après la dernière prise chez 77 sujets australiens et 74 sujets suisses régulièrement traités par méthadone et ne recevant pas d’autre prescription qu’un éventuel traitement par BZD.
L’autodéclaration des consommations de substances psycho-actives était confrontée aux résultats des tests urinaires.
La mesure des taux plasmatiques de méthadone utilisée était le rapport de la concentration de (R)- et (S)-méthadone sur la posologie quotidienne de méthadone (C/P), reflétant mieux la biodisponibilité et la clairance réelle de méthadone.
Dans les 2 groupes, seules la consommation de cannabis (au moins une fois au cours de la période explorée) et des posologies quotidiennes élevées de méthadone étaient significativement associés à des taux plasmatiques (C/P) plus faibles de (R)- et (S)-méthadone 24 heures après la dernière prise.
L’association entre des posologies quotidiennes élevées de méthadone et des taux plasmatiques résiduels faibles a déjà été observée et pourrait s’expliquer par une auto-induction du métabolisme hépatique de méthadone ou une saturation de la liaison protéique plasmatique de méthadone réduisant le rapport concentration plasmatique totale/posologie quotidienne sans réelle modification de la fraction libre.
C’est par contre la première fois qu’une association entre consommation de cannabis et taux plasmatiques résiduels de (R)- et (S)- méthadone (C/P) est notée.
Elle pourrait être liée à une induction des cytochromes hépatiques CYP1A2 accélérant le métabolisme de la méthadone bien qu’aucune association n’ait été retrouvée entre tabagisme et taux plasmatiques de méthadone.
Une autre explication pourrait être l’inhibition par les cannabinoïdes de l’activité de la glycoprotéïne P, responsable du transport transmembranaire de méthadone.
Une association significative entre la prise de BZD et les taux plasmatiques de méthadone n’a été retrouvée que dans le groupe suisse pour les taux plasmatiques de (R)-méthadone (C/P), lorsque seules les benzodiazépines interagissant avec les cytochromes CYP3A4 sont maintenues dans le modèle (exclusion de l’analyse de l’oxazépam et du lorazépam).
Ce dernier résultat mérite réplication mais indiquerait que l’usage de BZD agissant sur les cytochromes CYP3A4 pourrait entraîner une élévation des taux plasmatiques de méthadone.