Introduction
Les traitements de substitution dans l’accompagnement des héroïnomanes ont commencé à se répandre en Belgique il y a maintenant une quinzaine d’années. La méthadone fut longtemps le seul produit connu et prescrit dans ce cadre. La buprénorphine à haut dosage (Subutex®), commercialisée en Belgique depuis fin 2002, commence à être connue. La littérature médicale à son sujet s’enrichit de nouvelles contributions. En outre, l’apparition récente en juin 2008 de la buprénorphine combinée à la naloxone (Suboxone®) a remis un coup de projecteur sur cette alternative à la méthadone.
Cette évolution a poussé le mouvement ALTO à revoir l’usage et la place relative de ces différentes possibilités thérapeutiques. En matière de dépendances, un traitement pharmacologique bien conduit est évidemment une condition indispensable à une possible réussite du suivi. La qualité de la relation thérapeutique et de l’accompagnement, que l’on souhaite très souvent pluridisciplinaire, est essentielle et déterminante. Elle ne sera cependant pas abordée dans cet article, plutôt centré sur les différentes options pharmacologiques et leurs places respectives.
Revue de littérature
La méthadone et la buprénorphine haut dosage (BHD : Subutex®) sont toutes deux plus efficaces que le placebo dans les traitements substitutifs au long cours (maintenance treatment), en termes de taux de rétention en traitement et de réduction de consommation d’héroïne (1).
Il n’a pas été montré de différence d’efficacité entre les deux produits pour ce qui est de la réduction de consommation d’héroïne. Cependant, le taux de rétention sous BHD est inférieur de 20 % à celui observé sous méthadone dans le schéma de traitement utilisé en pratique de médecine générale (doses flexibles) (1).
L’emploi de la buprénorphine est potentiellement moins dangereux en ce qui concerne le risque d’overdose : son effet antagoniste partiel limite la dépression du centre respiratoire par effet plafond. Ce bénéfice potentiel doit cependant être pondéré par une plus grande fréquence de mésusage (injection IV). La buprénorphine est hydrosoluble et donc facilement injectable. Le risque d’overdose est réel si le produit est injecté en cas de poly-intoxication (effet additif voire synergique avec d’autres dépresseurs du SNC comme l’alcool ou les benzodiazépines).
Ce mésusage plus fréquent accroît également le risque de contamination virale et bactérienne. La moindre rétention en traitement par la BHD est contrebalancée par le fait que ce produit élargit la palette des traitements et augmente donc l’attrait des filières de soins aux yeux des usagers pour lesquels l’image sociale véhiculée par la méthadone peut être ressentie comme stigmatisante. Le choix entre méthadone et BHD se fera donc au cas par cas, essentiellement en fonction de l’expérience du médecin et des attentes du patient (2).
Situations particulières :
- en cas de grossesse la méthadone reste le traitement de choix (2, 3, 4)
- en cas de poly-toxicomanie chez un usager injecteur d’héroïne, la préférence sera donnée à la méthadone (3)
- en cas de dépendance à la codéine l’expérience clinique suggère que la préférence pourrait être donnée à la BHD (4)
- en cas d’insuffisance rénale sévère, la buprénorphine est contre-indiquée (2)
- en cas d’insuffisance hépatique sévère, la buprénorphine est contre-indiquée (2)
- en cas de QT long, la buprénorphine sera préférée à la méthadone (6, 7 ,8)
- en cas d’insuffisance respiratoire sévère, la méthadone (5) et la buprénorphine (2) sont contreindiquées
D’autres avantages potentiels de la BHD par rapport à la méthadone ont été avancés mais ne sont à ce jour pas confirmés par les études cliniques : sevrage plus aisé, administration bi- ou tri hebdomadaire possible, interactions médicamenteuses moins fréquentes et moins importantes, syndrome d’abstinence du nouveau-né moins fréquent et plus court.
Depuis juin 2008, la BHD est proposée en association fixe avec de la naloxone (Suboxone®). Sur le plan théorique ce concept est séduisant : en usage sublingual l’effet est équivalent à celui de la BHD seule, mais en usage IV la naloxone induirait un désagréable sevrage précipité, décourageant le patient de recommencer. Toutefois, l’expérience clinique avec cette nouvelle association est actuellement encore très limitée.
Plus particulièrement, le bénéfice de sécurité attendu (moindre recours à l’injection) n’a à ce jour été montré que de façon limitée, dans une seule étude (9) basée sur des questionnaires et menée sur un petit nombre de patients. De plus, cette étude a été réalisée dans un contexte très éloigné des soins de santé de première ligne. Par ailleurs, aucune donnée n’est encore disponible sur l’innocuité de l’administration quotidienne de naloxone à long terme.
Il est donc prématuré de se prononcer sur la place relative de cette association par rapport à la BHD seule.
Conclusion
Pour guider le choix des praticiens de première ligne, il nous paraît souhaitable d’articuler les enseignements que nous pouvons tirer de la littérature avec l’expérience des médecins familiarisés avec l’usage de la méthadone et de la buprénorphine.
Les recommandations suivantes expriment l’avis actuel du mouvement Alto-SSMG ; devant être réévaluées au fil des publications futures et de l’expérience grandissante des différents traitements, elles sont donc provisoires, tout particulièrement en ce qui concerne l’association buprénorphine-naloxone, d’introduction la plus récente.
En pratique, le choix entre méthadone et BHD se fera au cas par cas, en tenant compte de l’expérience du praticien, de la préférence du patient et des données issues de la littérature énoncées précédemment.
Ainsi, par exemple, certains praticiens donneront éventuellement la préférence à la méthadone en cas de trouble psychiatrique sévère.
Si les deux produits se retrouvent à égalité dans ce colloque singulier, il est recommandé d’utiliser la méthadone en première intention (4, 10).
Il n’existe pas de données de qualité permettant de savoir à quel(s) type(s) de patient la méthadone ou la BHD conviendrait le mieux dans le cadre d’un traitement de substitution ou de sevrage (2). Des guidelines relèvent cependant quelques situations particulières.
La méthadone devient le premier choix dans les situations particulières suivantes :
- usage IV chez un polytoxicomane
- grossesse ou risque de grossesse
La buprénorphine devient le premier choix dans les situations particulières suivantes :
- allongement du QT, congénital ou acquis, notamment secondairement à des médicaments
- dépendance à la codéine
Références
- (1) Mattick RP, Kimber J, Davoli M. Buprenorphine maintenance versus placebo or methadone maintenance for opioid dependence (Review). Cochrane Database of Systematic Reviews (2) :CD002207, 2008.
- (2) National pharmacotherapy policy for people dependent on opioids. Commonwealth of Australia, 2007.
- (3) Conférence de Consensus. Stratégies thérapeutiques pour les personnes dépendantes des opiacés : place des traitements de substitution. ANAES, 2004.
- (4) Drug misuse and dependence. UK guidelines on clinical management. Department of Health (NHS), London, 2007.
- (5) Dictionnaire VIDAL
- (6) Wedam EF, Bigelow GE, Johnson RE., Nuzzo PA., Haigney MCP. QT-interval effects of methadone, levomethadyl, and buprenorphine in a randomized trial. Arch Intern Med 2007; 177; 2469-75.
- (7) Martell BA, Arnsten JH, Krantz MJ, Gourevitch MN. Impact of methadone treatment on cardiac repolarization and conduction in opioid users. Am J Cardiol 2005; 95 : 915-8
- (8) Ehret GB, Voide C, Gex-Fabry M et al. Drug-induced long QT syndrome in injection drug users receiving methadone. Arch Intern Med 2006; 166 : 280-87
- (9) Alho H, Sinclair D, Vuori E, Holopainen A. Abuse liability of buprenorphine-naloxone tablets in untreated IV drug users. Drug Alcohol Depend 2006 ;88 :75-8.
- (10) Methadone and Buprenorphine for the Management of Opioid Dependence. Technology appraisal 114. London : National Institute for Health and Clinical Excellence 2007.
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Christelle PEYBERNARD (CSAPA Arpajon)
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
En pratique clinique, le choix entre méthadone et BHD, comme traitement de substitution de la dépendance majeure aux opiacés est multifactoriel.
Nous prenons en charge différemment un patient bien intégré qui consomme depuis peu et une personne marginalisée, héroïnomane depuis 15 ans et porteuse de comorbidités psychiatrique.
Ce choix s’oriente selon :
Les indications thérapeutiques et les données de la littérature.
L’histoire des patients. Son histoire personnelle, ses antécédents psychiatriques et somatiques, l’histoire de sa toxicomanie.
Et enfin, l’expérience du praticien.
En effet, au delà de l’aspect technique, il y a l’expérience acquise au cours du temps qui permet de se forger une opinion des TSO et de leurs indications préférentielles.
Bien entendu, la qualité de la prise en charge d’un patient dépendant des opiacés est essentielle, et celle-ci doit être la plupart du temps pluridisciplinaire, en réponse au multiples problématiques que posent ces patients.
Méthadone et BHD sont 2 traitements de substitution qui n’ont pas montré de différence d’efficacité, mais que nous prescrivons en pratique chez des patients ayant des profils différents.
Nous privilégions par exemple la méthadone pour les patients injecteurs, polytoxicomanes et/ou héroïnomanes de longue date, précarisés et porteurs de comorbidités psychiatriques et somatiques.
La méthadone est un agoniste complet des récepteurs opiacés, ce qui lui confère des propriétés analogues à celles de la morphine, qui d’expérience soulage mieux ce profil de patient.
Comme pour la BHD, les accidents mortels sont très souvent liés aux BZD surconsommées en association, notamment lors de traitements mal gérés.
Mais le cadre de prise en charge associé à la méthadone nous permet de voir ces patients plus régulièrement.
Des cas d’allongement de l’intervalle QT et de torsades de pointe ont été rapportés, principalement pour des posologies élevées (> 120 mg par jour).
La buprénorphine haut dosage (BHD) se distingue par une action agoniste-partielle, qui lui confère une meilleure sécurité d’emploi que celle des autres opiacés, avec des risques de surdosage faible.
L’existence d’un effet plafond lié à cette double action agoniste et antagoniste est retenue par la plupart des auteurs pour expliquer la minimisation des risques de dépression respiratoire, à la différence des agonistes purs comme l’héroïne, la morphine, ou la méthadone. Par contre les mésusages, l’injection et l’usage de la voie inhalée sont fréquents.
Dans mon expérience les pratiques d’injection concernent en moyenne 25 à 30 % des patients en début de prise en charge, puis diminuent avec la poursuite de celle-ci.
Des complications locorégionales graves sont alors à craindre dans ce cas : occlusions de la veine centrale de la rétine, ulcères veineux compliqués, lymphoedèmes…
Si l’existence d’un effet plafond limite les risques d’overdoses les associations dangereuses avec les benzodiazépines et l’alcool en sont à l’inverse extrêmement génératrices.
On estime que 10 à 20 % des patients sous buprénorphine font un mésusage de benzodiazépines.
Nous prescrivons donc, plus souvent la BHD aux patients non injecteurs, qui ont gardé un bon ancrage social et qui consomment depuis peu ou sont stabilisés.
Nous la réservons plutôt aux patients les plus insérés, également parce que le cadre législatif de celle-ci impose moins de contraintes, à des patients qui ont souvent une activité professionnelle.
La mise en place du traitement de substitution peut s’accompagner d’une apparition ou d’une aggravation d’un tableau psychiatrique sous-jacent.
Un avis spécialisé est obligatoire pour choisir entre les différentes options thérapeutiques et assurer le traitement symptomatique.
L’indication de la méthadone pour des « effets antipsychotiques » préconisée par certains auteurs me parait hasardeuse face aux molécules dont nous disposons actuellement.
Il me semblerait plus adapté de dire que probablement la méthadone de par son effet agoniste morphinique pur contient mieux les angoisses psychotiques que la BHD.
Un aspect me paraît important et concerne l’expérience que le patient a pu avoir des TSO.
Il est certain que si la méthadone ou la BHD a été mésusée, il sera difficile de l’envisager ensuite comme TSO.
Or, c’est une situation qui se retrouve plus fréquemment avec la BHD, et qui incite les patients à demander préférentiellement l’accès à la méthadone.
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Thierry JAMAIN (UFATT Nancy)
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
Le premier choix de médicament de substitution énoncé par le patient est à privilégier.
Une majorité de patients, demandeurs de prise en charge pour leur addiction, ont déjà expérimenté les deux molécules de substitution bien avant leur première consultation médicale.
Le patient, en général, connait les dispositifs locaux.
En cabinet de médecine générale, la buprénorphine, plus rapide à obtenir, est donc demandée en priorité.
En institution, à l’inverse, la méthadone est le traitement privilégié par les sujets dépendants.
Le rôle du prescripteur est, outre le recueil des antécédents, de l’histoire de(s) l’addiction(s), de l’examen clinique et des souhaits du patient, de s’assurer de la réalité clinique ou biologique de la dépendance et si un traitement de substitution est indiqué, de le valider dans le cadre d’un projet de soin.
Le choix de la molécule sera proposé en fonction des critères de l’article précédent, de la demande du patient et des possibilités de prescription par rapport au lieu (consultation initiale en médecine générale ou en institution).
Cette dernière remarque concernant l’offre de soin reste dans beaucoup de régions l’élément décisif du choix.
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Pierre-Matthieu DANG-VU (CH G. RENON, Niort)
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
Une réflexion sereine parait impossible sur ce sujet pour le moment.
La situation perdurant, je crois que chacun des médecins (généraliste de ville et addictologue de centre) a su trouver une place « confortable », les rôles étant, par les cadres respectifs de prescription, attribués plus ou moins par avance pour ce qui est du choix de médicament prescrit.
Ce confort, je crois, renvoie à la notion de « sécurité » bien établie dans le réseau de soins actuel.
Finalement, si tous les médecins pouvaient prescrire l’un ou l’autre des 2 médicaments pour la dépendance opiacée, cela ne poserait-il pas la question de la pertinence de l’existence des Centre de Soins Spécialisés ou CSAPA ?
Si tous les généralistes étaient formés et tous les pharmaciens coopérants, l’induction en centre deviendrait peut-être l’induction en service hospitalier dans ces indications actuelles…
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Jean-François CANNARD, médecin généraliste à Dijon (21) et coordinateur du Réseau Toxicomanie Côte d’or
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
On ne peut qu’adhérer à la qualité et au caractère pragmatique de cet article.
Recentrer les choix thérapeutiques sur des critères objectifs d’indications et de contre-indications est toujours bienvenu.
Les choix énoncés me semblent particulièrement pertinents.
Je serais simplement tenté d’ajouter que l’expérience du patient qui a la plupart du temps « testé » la buprénorphine ou la méthadone, appelées improprement de rue, est également un critère à prendre en considération.
Autre remarque : Le cadre légal français de prescription de ces deux molécules entraine de fait la création de deux filières de soin, l’une spécialisée pour la primo-prescription de méthadone, l’autre en soin primaire pour la prescription de buprénorphine avec des critères d’accessibilité que nous connaissons.
Ceci entraine l’apparition d’un bruit de fond préjudiciable aux bonnes décisions thérapeutiques en soin de premier recours.
Il me semble nécessaire d’œuvrer à tous les niveaux décisionnels, politiques mais également dans le cadre de la formation universitaire et continue pour réduire ce bruit de fond et ne pas attendre que le mésusage de telle ou telle molécule vienne, en stigmatisant nos patients et leurs prescripteurs, réorienter les décisions thérapeutiques vers les bonnes indications.
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Philippe PLANE, Médecin généraliste à Jarville (54)
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
Notre perception de généraliste français des indications respectives de la méthadone et de la BHD est effectivement fortement conditionnée par les conditions de délivrance d’accessibilité de ces traitements dans notre pays.
Je ne connais pas les raisons d’une indication préférentielle de la méthadone en cas de grossesse, car la BHD a, me semble-t-il, fait ses preuves dans ce cas (sans doute les équipes des maternités ont elles une expérience plus poussée à ce sujet).
Pour moi, outre l’injection IV, la méthadone serait indiquée en cas de substitution insuffisante sous BHD, avec persistance de symptômes de sevrage.
Je ne vois pas pourquoi la dépendance à la codéine serait plus une indication de la méthadone : j’ai personnellement initié des TSO par BHD dans ce cas sans problème.
La notion d’indication de la BHD en première intention, puis de la méthadone en 2ème intention reste donc a priori valable.
Il serait intéressant de connaître l’expérience des pays qui pratiquent l’inverse : sur quels critères passent-ils de la méthadone à la BHD ?
En ce qui concerne les risques d’OD, dispose-t-on de statistiques valables à ce sujet, collectant les circonstances et causes des décès chez les UD ? Pour ma part, j’ai connu plusieurs décès chez les utilisateurs de BHD, aucun chez les patients sous méthadone, mais ces derniers sont moins nombreux.
Enfin l’enjeu actuel me semble aussi être celui de la possibilité de prescrire la méthadone en ville, mais c’est une autre question…
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Philippe VENTROU, Médecin généraliste, La Rochelle (17)
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
Dans la situation française où le traitement par la buprénorphine est prescrit en première intention et en fonction de mon expérience, voici les remarques que je peux faire :
- La buprénorphine peut être considérée comme un traitement d’urgence, en raison de sa très bonne accessibilité tant pour le prescripteur que pour l’usager de drogue.
Une seule consultation suffit pour proposer une solution immédiatement opératoire… en attendant une évaluation ou un passage à la méthadone si l’indication préférentielle est posée d’emblée.
- La méthadone est indiquée lorsque la BHD a des effets secondaires mal supportés.
- Lorsque qu’aucune indication particulière n’est posée au départ, le traitement de méthadone est indiqué lorsqu’à posologie maximale de buprénorphine, la personne ne se sent pas stabilisée.
De manière assez fine, les personnes expriment souvent qu’ils ne se sentent pas « normaux ». Les faits en attestant peuvent être des consommations non festives d’opiacés ou une absence de sentiment de soulagement.
Je note par ailleurs que des re-consommations tardives et répétées d’héroïne, après une phase de stabilisation parfois longue de plusieurs années, signent probablement un épuisement de l’effet de la buprénorphine dont le mécanisme est certainement complexe. La substitution de la buprénorphine par la méthadone règle le plus souvent ce problème.
- La méthadone est indiquée, en première intention, chez les injecteurs compulsifs qui ne sont pas forcément tous polytoxicomanes (mon avis diffère un peu de celui des auteurs de l’article).
Dans cette situation et bien que n’ayant aucune expérience de Suboxone®, je trouve que cette dernière option ne présente aucun intérêt autre qu’un traitement de troisième intention, en cas de contre-indication médicale à la prescription de méthadone.
- La méthadone est indiquée, en première intention, chez les personnes polytoxicomanes (pas toujours injectrices compulsives) ayant un usage « dur » des produits (alcool, médicaments ou drogues illicites).
- La méthadone est indiquée, en première intention, en cas de comorbidité psychiatrique entraînant une souffrance psychique tellement importante qu’elle a des répercussions sociales et comportementales entravant l’évolution dans le processus de soin.
Sur ce sujet, mon avis est toutefois peu étayé ; c’est juste un sentiment.
Je souscris totalement à l’idée que le choix, de toute façon, doit être discuté entre les protagonistes.
Voilà un traitement où il est vraiment possible de se livrer à des essais sans conséquences négatives.
Il faut pour cela que nous puissions avoir des instruments d’évaluation suffisamment valides et adaptés à la pratique de la médecine générale pour proposer un changement de cap si nécessaire et ce, de manière active, positive et rapide.
Commentaire de lecture adressé à la rédaction par le Dr Sophie VELASTEGUI, Membre du Comité de Rédaction, CH Clermont
Publié dans le Flyer n° 41 (Déc. 2010)
Cet article est très intéressant puisque nos pratiques en France sont différentes.
Les médecins généralistes ont la possibilité d’initier un traitement substitutif aux opiacés uniquement par la buprénorphine.
Quant à la méthadone, la primoprescription est réservée aux médecins hospitaliers et aux médecins travaillant dans les centres spécialisés.
Médecin hospitalier d’un service d’addictologie, j’ai donc la possibilité de prescrire les 2 TSO et de faire du cas par cas puisque chaque prise en charge est unique.
En pratique, je propose la buprénorphine en première intention, excepté pour les patients injecteurs d’héroïne.
En cas de désir de grossesse ou de grossesse, je ne change pas de TSO puisque les deux traitements sont autorisés.
Cependant, je modifierais si besoin la posologie et le nombre de prises quotidiennes afin d’éviter tout symptôme de manque que la patiente pourrait manifester.
Quant à Suboxone®, elle a sa place selon moi dans la substitution opiacée. Je n’hésiterais pas à la proposer à mes patients dès que celle-ci sera commercialisée.
En ce qui concerne mon secteur d’activité professionnelle, je constate que les médecins généralistes sont réservés quant au relais de la prescription d’un traitement par la méthadone dans leur cabinet, s’expliquant en partie par la pénurie de médecins et par conséquent de leur disponibilité limitée.
Pour un meilleur accompagnement de ces patients usagers de drogues, il serait intéressant que les médecins généralistes puissent initier des traitements par la méthadone pour que l’accès aux 2 TSO devienne équitable.
Pour cela, une formation serait recommandée.
Les services hospitaliers où on fait de l’addictologie et les centres de soins spécialisés resteraient un lieu ressource pour les patients avec le plus de comorbidités (somatiques, psychiatriques, sociales…), ou pour un avis spécialisé à tout moment de l’accompagnement.