Traitements pharmacologiques de l’arrêt du tabac et risque de dépression, suicide et automutilation en pratique clinique : étude de cohorte prospective.
En France, se pose régulièrement la question des troubles suicidaires sous bupropion (ZYBAN®) et varénicline (CHAMPIX®), deux médicaments commercialisés dans le sevrage tabagique. Cette interrogation est également présente dans d’autres pays, notamment aux Etats-Unis, où les autorités de santé (FDA) ont exigé des firmes, la mention du risque de troubles psychiatriques sévères sur le conditionnement.
Le BMJ (British Medical Journal) a publié en octobre 2013 un article évaluant la fréquence de survenue de ces troubles. A partir des données recueillies par 349 médecins britanniques, Kyle Thomas, de l’université de Bristol, et son équipe ont mené une étude de cohorte prospective incluant 119 456 adultes.
Entre septembre 2006 et octobre 2011, les critères de risque suicidaire et de dépression ont été évalués par l’intermédiaire de bases de données nationales (dont le recueil portait sur la mortalité ou encore sur les hospitalisations).
En comparaison aux substituts nicotiniques classiques, les résultats n’ont pas permis de relever de sur-risque suicidaire ou de dépression chez les patients traités par bupropion ou de la varénicline.
La mortalité globale était même diminuée avec les deux traitements pharmacologiques (OR de 0,39 pour le bupropion et 0,44 pour la varénicline).
Dans leur conclusion, les auteurs estiment que les résultats de cette étude sont plutôt rassurants pour les patients recevant ces traitements d’arrêt du tabac, d’autant plus lorsque l’on sait que le tabac est la première cause de mortalité évitable à travers le monde.
Commentaires de la rédaction
Cette étude confirme que, malgré les alertes lancées dès leur commercialisation, les médicaments Zyban® et Champix®, pour ne pas les nommer, ne provoquent pas de risques suicidaires et de dépression dans les proportions qui avaient été évoquées et qui avaient, il faut bien le reconnaître, effrayé le monde médical, les fumeurs eux-mêmes et les autorités de santé.
Cela pose la question de l’évaluation des risques iatrogènes, en particulier dans le domaine de l’addiction.
Les dispositifs en charge de l’évaluation des risques effectuent parfois une comptabilité des effets secondaires un peu brute, sans tenir compte du profil des patients et des conséquences de la ‘maladie’ initiale qui justifie le traitement.
Hors contexte, une série malheureuse d’évènements peut disqualifier des traitements utiles et efficaces pour le plus grand nombre, avec des impacts en termes de mortalité considérables.
C’est peut-être une des conséquences de ce qui nous paraît être la recherche du risque Zéro qui, poussée à son paroxysme, peut être extrêmement contre-productive.