Résumé
Les traitements de substitution à la méthadone (MMT) ont été introduits, pour la première fois, en Allemagne en 1987, après une longue controverse à ce sujet. Le nombre de patients soumis à ce traitement – d’abord faible à cause de critères d’admission très stricts – a augmenté de façon considérable depuis les années 1990 pour atteindre le nombre d’environ 65 000 patients en 2006.
En Allemagne, tout médecin généraliste ayant suivi une formation complémentaire en addictologie est autorisé à prescrire des médicaments de substitution aux patients dépendants des opiacés. Actuellement, 2 700 médecins généralistes prescrivent des médicaments de substitution. Tous les patients qui suivent un traitement à la méthadone devraient pouvoir bénéficier d’un accompagnement psycho-social.
Les résultats des études et des expériences pratiques indiquent clairement que le traitement à la méthadone est bénéfique pour les patients en termes de santé physique et mentale. Le traitement à la méthadone s’est révélé efficace en atteignant des taux de rétention élevés (65 à 85% au cours des premières années, jusqu’à 50% après plus de sept ans) et joue un rôle essentiel dans l’accès et la poursuite des traitements médicaux contre le HIV et l’hépatite. Le traitement de substitution à la méthadone est également considéré comme un facteur vital dans le processus de réinsertion sociale et contribue à la diminution des effets nocifs de la toxicomanie tels que la mortalité et la morbidité, et à la prévention des maladies infectieuses. Quelques 10% des patients qui suivent un traitement de substitution à la méthadone finissent, à long terme, par abandonner la consommation de drogue.
La méthadone est le médicament de substitution le plus fréquemment prescrit en Allemagne, bien que la buprénorphine commence également à s’affirmer. L’accès au traitement de substitution en zone rurale est extrêmement inégal et constitue encore un problème. Il existe seulement quelques opportunités d’emploi pour les patients qui suivent un TSO, bien qu’un emploi régulier soit unanimement considéré comme un facteur de succès du traitement.
Le traitement de substitution dans les prisons allemandes est également hétérogène en termes d’accès et de méthodes de traitement. L’accès est très inégal et le nombre de détenus sous traitement est limité. Cependant, le traitement de substitution joue un rôle substantiel dans le système de soins proposés aux toxicomanes en Allemagne.
En Allemagne, l’historique des vingt années de prescription des traitements de substitution à la méthadone a permis d’accumuler une expérience considérable, entre autres dans le développement de la recherche sur l’organisation des soins, de définition de recommandations et la mise en place de mesures d’assurance-qualité. La mise en place de traitements de substitution tenant compte de différents paramètres tels que l’historique de la consommation de drogue, l’adaptation des posologies, la prise d’autres substances psycho-actives (alcool, benzodiazépine, cocaïne), la gestion des ‘populations de patients difficiles’ et l’intégration dans l’environnement social a été organisée avec succès. Des programmes d’accompagnement psycho-social complémentaires au traitement de substitution ont également été mis en place et, dans le cadre d’un projet-pilote sur le traitement à base d’héroïne médicalisée, un mode opératoire a été élaboré.
Le choix d’administrer aux consommateurs d’opiacés la « bonne » forme de thérapie au « bon » moment constitue encore un défi, bien que le projet-pilote sur le traitement à base d’héroïne ait été concluant pour les patients pour lesquels la thérapie à la méthadone n’a pas été efficace. Nous avons également acquis une compétence dans la prise en charge de comorbidités spécifiques telles que le HIV/sida, l’hépatite et les maladies psychiatriques. La promotion et la participation de groupes d’auto-support joue un rôle important dans le succès du traitement de substitution.
L’article
Historique
L’héroïne est arrivée sur le marché des stupéfiants en Allemagne dans les années 70 et son arrivée a été immédiatement suivie d’une rapide augmentation du nombre de consommateurs d’héroïne et des personnes dépendantes de cette drogue. On estime actuellement le nombre d’héroïnomanes en Allemagne à 120 000/150 000.
Jusqu’au milieu des années 80, la politique nationale allemande en matière de drogue s’est fondée sur ce que l’on appelle « le paradigme de l’abstinence », mais, suite à l’augmentation des infections à HIV parmi les toxicomanes, les orientations juridiques, médicales et politiques ont changé en choisissant une stratégie plus pragmatique et plus orientée vers la réduction des risques [5-1].
Bien que le premier projet expérimental de traitement à la méthadone ait été mené à Hanovre au milieu des années 70, le traitement de substitution destiné aux consommateurs d’héroïne est resté un sujet très controversé en Allemagne encore pendant longtemps, car les conclusions de l’étude avaient été mal interprétées par une grande partie des politiques et des spécialistes des questions liées à la drogue. Malgré la diminution de 100% des actes de criminalité ainsi que la réinsertion sociale et la réhabilitation professionnelle, cette étude a été considérée comme un échec car les patients n’ont pas réussi à rester abstinents [6].
Sur une plus vaste échelle, ce choix de traitement a été introduit relativement tard, principalement en réponse à une menace d’augmentation de la prévalence du HIV et du sida parmi les consommateurs de drogues injectables en Allemagne au milieu des années 80. Cependant, ce choix reflétait une augmentation des effets négatifs associés à la consommation de drogue, ainsi que du taux de mortalité chez les toxicomanes, le manque d’attractivité des services orientés vers l’abstinence et un fort engagement de la part d’une poignée de parents d’héroïnomanes et de médecins généralistes.
Tous ces facteurs ont finalement conduit à la mise en place de services orientés vers une réduction des risques, à savoir de centres d’accueil « à exigences limitées » et de programmes d’échange de seringues. Le premier programme de traitement de substitution à la méthadone à vaste échelle a été lancé en 1987 dans le cadre d’un projet-modèle, dans le land Nord-Rhein-Westaphalen [7, 8]. La loi allemande sur les Stupéfiants, modifiée en 1992, a enfin admis le caractère légal des traitements de substitution à la méthadone pour les consommateurs d’opiacés.
Jusqu’à maintenant, le traitement de substitution a été l’élément le plus important parmi tous les choix disponibles dans le cadre du traitement des dépendances aux opiacés.
…cependant, bien que les résultats du TSO par la méthadone aient été jugés globalement positifs en Allemagne, les traitements de substitution sont encore peu disponibles et peu accessibles [10].
Au cours des 15 dernières années, le nombre global de participants aux programmes de traitement de substitution a augmenté, pour passer d’un millier à la fin des années 80 à 65 000 en 2006 [9] ; cependant, bien que les résultats du TSO par la méthadone aient été jugés globalement positifs en Allemagne, les traitements de substitution sont encore peu disponibles et peu accessibles [10].
Jusqu’au début des années 90, la méthadone pouvait être administrée aux héroïnomanes seulement lorsqu’un certain nombre de critères extrêmement spécifiques étaient satisfaits (par ex. dans des cas urgents tels que des états de manque susceptibles de mener au décès, de fortes douleurs, de grossesse ou d’infection au HIV). Un certain nombre de médecins généralistes qui, passant outre les dispositions légales, prescrivaient la méthadone aux consommateurs d’opiacés, ont été poursuivis.
Certains médecins ont commencé à prescrire la codéine ou la dihydrocodéïne (DHC) (administrée sous la forme de jus de fruit), des substances qui ne faisaient l’objet d’aucune restriction en vertu de la loi sur les stupéfiants [11].
D’autres médecins ont suivi cet exemple et, pendant de nombreuses années, la codéine et la DHC ont été prescrites à un grand nombre de toxicomanes grâce à un vide juridique.
Après que plusieurs programmes pilote aient montré l’efficacité des traitements de substitution à la méthadone, la Sécurité Sociale allemande a fini par autoriser le traitement en publiant, en 1991, des instructions pour le financement de celui-ci.
En Allemagne, le coût du traitement et du médicament est généralement pris en charge par les programmes de santé publique qui prévoient la couverture légalement mandatée d’au moins 90% de la population (dans des cas spécifiques, par exemple pour les sans abri, les frais médicaux sont pris en charge par les services d’assistance sociale). Les patients sont également libres de choisir leur propre médecin généraliste ou l’hôpital dans lequel ils souhaitent suivre le traitement.
Cadre légal du traitement de substitution
Depuis 1981, l’augmentation du nombre de toxicomanes et de toxicomanes délinquants a mené à la définition détaillée de mesures aptes à réduire la demande de stupéfiants et les risques liés à l’usage de drogue, entre autres par le principe de la « thérapie substitutive de la peine » (1981), par les traitements de substitution et la distribution de seringues stériles jetables (1992) et de salles d’injection (2000).
Le traitement de substitution destiné aux personnes dépendantes des opiacés implique la prescription régulière et l’administration d’opiacés selon les termes de la Loi sur les Stupéfiants. Toutefois, la disposition la plus importante prévoit que, non seulement les doses requises de médicaments de substitution doivent être disponibles, mais aussi que le traitement de substitution doit comporter une thérapie complète et certifiée contre l’addiction, comprenant des traitements psychiatriques, psychothérapeutiques et/ou psychosociaux.
Par conséquent, une étroite coopération est nécessaire entre les médecins et les autres spécialistes de l’addiction (à savoir les psychiatres, les psychologues, les services psycho-sociaux) et des plans de soins individuels doivent être définis pour chaque patient.
Les médecins doivent enregistrer leurs patients auprès du Comité Fédéral de Contrôle des Stupéfiants (Bundesopiumstelle) pour éviter qu’un patient puisse recevoir des médicaments de substitution prescrits par un autre médecin, ou qu’il ne suive pas le traitement d’accompagnement nécessaire, ou qu’il utilise des substances susceptibles de mettre en danger le but du traitement de substitution ou utilise le médicament de substitution d’une façon interdite par la loi (par ex. par voie intraveineuse).
Les médecins sont tenus de documenter toutes les données importantes relatives au patient et au traitement, y compris l’historique de cas/l’anamnèse et les résultats des examens physiques ; l’indication, le diagnostic, le but du traitement ; la formulation et la prescription de l’assistance et de services d’accompagnement nécessaires (par ex. le conseil psycho-social) ; la notification codée et anonyme des patients auprès du registre central des traitements de substitution ; la fréquence et les résultats du dépistage anti-drogue et la surveillance de la prise d’autres substances psychotropes ; les informations sur les dangers et les effets secondaires de la (mauvaise) utilisation de substances collatérales ; la forme, le dosage et les modes d’administration de la substance de substitution ; la justification des doses à emporter et l’état actuel du traitement ; les raisons d’une éventuelle exclusion du traitement et un plan de soins individuel.
Chaque année, le service régional de la Sécurité Sociale vérifie un petit pourcentage de documents en sélectionnant au hasard certains cabinets médicaux. Les médicaments de substitution ne doivent pas être prescrits par voie parentérale (intraveineuse). Les médicaments de substitution doivent être administrés et/ou pris sous la supervision d’un cabinet médical, d’un hôpital, d’une pharmacie ou d’autres professionnels autorisés par les autorités fédérales compétentes. Le patient peut emporter chez lui jusqu’à sept doses de médicament de substitution lorsque la dose de substitution a été fixée et lorsqu‘il n’utilise pas, en même temps, d’autres substances nocives et/ou administrées par voie intraveineuse . En cas de voyage à l’étranger, le médecin peut prescrire au patient jusqu’à 30 doses à emporter sur une période de 12 mois.
L’âge minimum des patients ne fait l’objet d’aucune disposition.
…les médecins qui souhaitent prescrire des traitements de substitution doivent obtenir une autorisation spéciale émise par le comité médical régional compétent et doivent fournir la preuve de leur participation à des cours de pharmacologie et de formation sur les addictions.
Tous les médecins qui souhaitent prescrire des traitements de substitution doivent obtenir une autorisation spéciale émise par le comité médical régional compétent et doivent fournir la preuve de leur participation à des cours de pharmacologie et de formation sur les addictions. Ces cours sont organisés par les comités médicaux régionaux et peuvent avoir une durée de 50-60 heures. Ils concernent des sujets tels que la dépendance aux opiacés et le rôle du traitement de substitution, l’aide psychologique aux patients soumis au traitement, l’évaluation, la gestion et les autres aspects de la pratique clinique [12].
Financement des traitements de substitution
Jusqu’en 2004, les patients couverts par la Sécurité Sociale et ceux couverts par l’assistance sociale devaient souffrir d’autres maladies en plus de la toxicomanie pour pouvoir bénéficier de la couverture du traitement de substitution. Depuis cette date, il suffit d’être déclaré comme héroïnomane par un médecin. En règle générale, les usagers de drogue seront acceptés pour le traitement s’ils sont en mesure de justifier d’un historique d’utilisation compulsive d’opiacés de deux ans (selon la Sécurité Sociale) et s’ils sont âgés de 18 ans minimum.
Bien que les règles dictées par la Sécurité Sociale soient applicables au niveau national, les conditions d’organisation et d’administration du traitement de substitution et des soins psychosociaux d’accompagnement peuvent varier d’un land à l’autre. En fonction du nombre de professionnels autorisés à fournir le traitement de substitution dans une certaine région, les médecins peuvent être autorisés à traiter jusqu’à 20 patients ou plus financés par la Sécurité Sociale.
Les Règles de Prescription des Stupéfiants n’établissent pas cette limitation. Les médecins autorisés à traiter 20 patients couverts par la Sécurité Sociale pourront, par exemple, traiter 20 autres patients relevant de l’assistance sociale ou un nombre illimité de patients payants non couverts par aucun système.
Guidelines Comité de Santé Fédéral concernant le TSO – amélioration de la qualité du traitement
Les instructions de l’Association des Médecins Allemands concernant le traitement de substitution destiné aux consommateurs d’opiacés, qui sont entrées en vigueur en mars 2002, spécifient que le traitement est indiqué dans les cas suivants :
- en cas de dépendance manifeste aux opiacés de longue durée, lorsque toute tentative d’abstinence a échoué,
- lorsque le traitement de substitution offre la meilleure chance de guérison ou d’amélioration par rapport aux autres choix thérapeutiques.
Le but du traitement de substitution est de stabiliser l’état de santé du patient dépendant et de l’amener progressivement vers l’abstinence. Il est essentiel d’améliorer l’accessibilité et la qualité du traitement de substitution. Par ailleurs, la mise en place des mesures envisagées jusqu’ici à cet effet est particulièrement importante afin de :
- améliorer les mesures de nature psycho-sociale, psychiatrique et psychothérapeutique nécessaires à l’administration du traitement et des soins et les offrir en quantité suffisante,
- créer des cercles de qualité pour la thérapie de substitution au niveau municipal.
Le traitement de substitution est un pilier essentiel du traitement des toxicomanes consommateurs d’opiacés en Allemagne. En vue de l’amélioration de l’assurance qualité du TSO à la méthadone, le comité de santé régional de Westfalen-Lippe a lancé un « Manuel du traitement de substitution des patients ambulatoires consommateurs d’opiacés », qui décrit les critères de définition de la qualité et les modalités nécessaires à assurer une excellente qualité des services et des activités quotidiennes. Les principales activités prises en compte sont liées aux médecins et aux infirmières (évaluation, diagnostic, documentation, délivrance, supervision). Ce manuel est largement utilisé (par 1 000 médecins généralistes) en tant que base pour assurer une bonne qualité du traitement de substitution [13].
Délivrance et buts du traitement
Différents types de structures sont développés en Allemagne. Les services de conseil aux patients ambulatoires proposent des contacts, une approche motivationnelle et le TSO, tandis que le sevrage proprement dit a généralement lieu dans les hôpitaux généraux ou dans certaines institutions spécialisées.
En Allemagne, le sevrage est généralement pratiqué en hospitalisation complète, bien que le sevrage en ambulatoire se soit révélé également efficace. Différents types d’institutions prennent en charge les toxicomanes pendant la phase de resocialisation, entre autres, des services hospitaliers ou cliniques spécialisées ou des communautés thérapeutiques. Dans la phase ultérieure et après le traitement, de nombreux modes d’assistance sont proposés en fonction des besoins de l’usager (par ex entre autres, pour la recherche d’un emploi, d’un logement ou la vie en communauté). Des spécialistes, qualifiés pour ce type d’assistance, travaillent généralement dans ce domaine spécifique [14]. Toutes ces possibilités offertes aux usagers ont pour but de stabiliser son état de santé et, à long terme, de l’amener à l’abstinence.
La substitution est le seul domaine qui offre un traitement sans abstinence.
Cependant, ce traitement est aussi celui qui touche le plus grand nombre par rapport à toutes les autres approches de traitement de la toxicomanie. Jusqu’ici, le lien entre le système primaire de santé allemand et le système de traitement spécialisé des addictions n’a pas entièrement fonctionné de manière efficace, bien que la coopération et la coordination au niveau régional se soient en partie bien développées.
L’unes des règles principales dans le traitement des toxicomanies est la coopération entre différents types de professionnels tels que les éducateurs, les psychologues et les médecins. Les responsables des centres, les Länder et les municipalités sont responsables de la qualité de la gestion et de la supervision professionnelle des services destinés aux consultants externes.
Contrairement à l’orientation du début des années 90, tournée vers l’abstinence, les objectifs du traitement sont maintenant plus réalistes et pragmatiques, à savoir :
- aider les patients à rester en bonne santé – grâce aux soins et au soutien nécessaires – tant qu’ils ne peuvent pas vivre sans drogue ;
- réduire l’utilisation par l’usager de drogues illégales et non prescrites ;
- gérer les problèmes liés à la consommation de drogue ;
- réduire les dangers associés à la consommation de drogue, en particulier celui de décès par overdose et d’infections par le virus HIV ou celui de l’hépatite contractés par l’injection et le partage des seringues et autres matériels d’injection ;
- réduire la durée des épisodes de consommation de drogue ;
- réduire les probabilités de rechute dans la consommation de drogue ;
- réduire le besoin de commettre des actes criminels pour financer la consommation de drogue ;
- améliorer le fonctionnement global de l’individu au niveau personnel, social et familial.
Les toxicomanes qui cherchent à sortir de la toxicomanie avec le soutien de professionnels disposent de toute une série d’approches d’assistance dans ce sens et de services thérapeutiques. Même les personnes qui suivent un traitement de substitution peuvent avoir envie, à un moment ou à un autre, de passer à une thérapie orientée vers l’abstinence.
Par conséquent, une étroite collaboration entre les médecins de ville et les services spécialisés (ambulatoires ou hospitaliers) est nécessaire afin de faciliter les progrès vers l’abstinence. Par ailleurs, les services hospitaliers spécialisés doivent prévoir la possibilité d’une phase initiale en traitement de substitution avant d’affronter la phase d’abstinence.
Entre-temps, des cliniques spécialisées ont été créées accueillant également des patients en traitement de substitution dans le but d’atteindre et de stabiliser l’abstinence au cours du traitement. Les premiers résultats montrent que le taux de succès de ces cliniques n’est pas inférieur à celui obtenu par les thérapies orientées vers l’abstinence [15].
Elargir les services afin d’améliorer l’insertion professionnelle
En ce qui concerne l’emploi, le marché du travail n’est pas facilement accessible aux patients en TSO en raison du fort taux de chômage en Allemagne (10,8% en mars 2006, à savoir environ 4,8 millions de personnes sans emploi) et des attitudes négatives/préjugés des employeurs vis-à-vis de ces patients. Par ailleurs, les caractéristiques démographiques et personnelles de ces patients (à savoir peu d’études et de qualifications professionnelles, casier judiciaire…) réduisent ultérieurement leurs chances de trouver un emploi. Bien qu’un certain nombre de grandes villes aient mis en place des projets éducatifs et de formation professionnelle, peu de structures d’assistance en matière d’éducation et d’emploi sont encore disponibles.
Le chômage est associé à un processus d’appauvrissement, entraînant un grand nombre de risques psychosociaux qui peuvent renforcer la consommation de drogue et le développement d’autres addictions liées à celle-ci.
C’est la raison pour laquelle le gouvernement allemand et les services de traitement attribuent une grande importance à la réinsertion sociale des personnes dépendantes aux psychotropes par le travail et par un emploi rémunéré. La mise en place de contrats et la coopération du gouvernement au cours de la phase de réinsertion sont absolument nécessaires pour les organismes qui s’occupent de l’assistance médicale et de la réinsertion professionnelle des toxicomanes. Un vaste travail de développement attend, dans le futur, les services d’assistance aux usagers dans ce domaine.
D’autres structures d’aide au travail, capables de refléter les différentes compétences et ressources des patients, manquent encore. Certains patients n’ont jamais évolué dans des environnements de travail traditionnels et doivent apprendre complètement à répondre à certaines demandes et à suivre certaines procédures.
D’autres ont déjà des expériences professionnelles à leur actif, mais ne sont plus au courant des exigences de l’environnement de travail. Des heures de travail dans des institutions caritatives peuvent être une solution pour certains patients, mais bien d’autres solutions possibles sont nécessaires pour remplir le temps dont disposent les patients et pour être efficace [16].
Promotion et qualification des activités d’auto-support
Les groupes d’auto-support constituent une composante essentielle de l’assistance offerte aux personnes exposées au risque d’addiction ou déjà dépendantes.
Les groupes d’auto-support (y compris les groupes de parents) devraient faire davantage partie des mesures d’accompagnement des activités de coordination et de planification afin de réduire les problèmes résultant de la consommation de substances psycho-actives. Ces groupes constituent une composante essentielle de l’assistance offerte aux personnes exposées au risque d’addiction ou déjà dépendantes.
Une étape fondamentale dans le développement des activités d’auto-support a été le développement de groupes autogérés d’usagers de drogue séropositifs. L’ouverture du secteur de la santé à l’auto-support et la reconnaissance de la compétence des patients concernés, grâce à l’action du mouvement AIDS-Help, a mené à une nouvelle orientation du système de santé allemand orienté vers une médecine somatique, ou, du moins, à quelques premiers pas dans ce sens. L’organisation et le développement des groupes JES (Junkies, Exusers, Substitute Drug Users) constitue le défi le plus radical pour les politiques de santé et les soignants.
Cela nécessite une confrontation avec les personnes concernées au premier plan et non pas une discussion à leur sujet. Les groupes JES, établis dans quelques 25 villes et auxquels adhérent activement quelques 300 usagers en traitement par la méthadone, assurent la défense de leurs propres intérêts.
Cette philosophie est exprimée comme suit dans leur déclaration constitutive : « JES est une fédération basée sur la solidarité entre les toxicomanes, les ex-toxicomanes et les usagers de TSO, qui s’expriment avec la compétence des personnes directement concernées et demandent à être reconnus par les politiques d’état en matière de drogue et de santé. Les usagers de drogue ont autant de droit à la dignité humaine que les autres individus.
Ils ne sont pas tenus de gagner ce droit par l’abstinence ou par des comportements conformes. Ils ont droit à des conditions de vie humaines et saines et à une vie sociale » [17].
L’impact des traitements de substitution à la méthadone en Allemagne
L’efficacité des traitements de substitution à la méthadone a été prouvée.
Les traitements de substitution à la méthadone ont été évalués dans le monde entier, y compris en Allemagne [18-21]. Compte tenu des différences d’approche méthodologique, de période d’évaluation, de taille des échantillons et de populations, les résultats des études allemandes sont seulement en partie comparables.
Cependant, nous pouvons citer un certain nombre d’aspects communs importants concernant les résultats globaux des études réalisées en Allemagne [4], à savoir :
- L’âge moyen des patients qui suivent un traitement à la méthadone est de 30 ans. La durée de la consommation d’héroïne avant le début de traitement varie entre 10 et 12 ans en moyenne.
- Plus des deux tiers des patients traités à la méthadone avaient été soignés dans des communautés thérapeutiques vers le sevrage – souvent plusieurs fois – avant le traitement à la méthadone, mais n’étaient arrivés que très rarement au bout du traitement administré par ces communautés. Un tiers des patients qui abandonnaient, avaient rechuté immédiatement dans la consommation d’héroïne.
- Le traitement de substitution à la méthadone a des taux de rétention nettement plus élevés que les communautés thérapeutiques (environ 65% des patients quittent les communautés thérapeutiques avant la fin des quatre premiers mois de traitement). Dans le Nord-Rhein Westphalia, par exemple, les taux de rétention ont été de 87% après un an, de 66% au bout de trois ans, de 53% au bout de cinq ans et de 48% au bout de sept ans [8]. Une évaluation du traitement de substitution à Hambourg a fait ressortir des taux de rétention de 84% au bout de trois ans, de 77% au bout de quatre ans et de 71% au bout de cinq ans [21].
- Déjà pendant la phase initiale de traitement, on enregistre une amélioration significative de l’état général de santé des patients traités à la méthadone, tout comme celui des patients contaminés par le HIV ou l’hépatite, qui se stabilise au cours du traitement. Les taux de séroconversion du HIV sont bien inférieurs à 1% par an au cours du traitement de substitution.
- Le risque de mortalité est nettement réduit. Le taux de survie des patients traités à la méthadone est trois à cinq fois supérieur à celui des héroïnomanes non traités.
- On assiste également à une réduction de la consommation de drogues illégales, qui se fait de façon linéaire, la cessation définitive dépendant de la durée de suivi du traitement. Après une année de traitement de substitution, la présence d’héroïne dans les urines cesse chez 80 à 90% des patients. Au fur et à mesure que le traitement se poursuit, on assiste également à une diminution, voire à un arrêt définitif, de la consommation d’autres substances psychotropes (la consommation d’autres substances psychoactives n’est pas une raison suffisante pour arrêter le traitement, mais cela nécessite un changement de modalités et son exploration).
- Environ 10% des personnes soumises au traitement cessent complètement la consommation de drogue (y compris la méthadone) [22]. Il n’existe, pour le moment, aucune étude de suivi sur la stabilité de l’abstinence. Toutefois, les expériences réalisées jusqu’ici montrent qu’un traitement à la méthadone limité dans le temps (sevrage trop rapide ou traitement de substitution à but d’abstinence à court terme) est généralement suivi d’une rechute dans la consommation illicite d’opiacés ainsi qu’une instabilité physique et psychologique [23].
La méthadone est le traitement destiné aux usagers pharmacodépendants aux opiacés le plus évalué et le plus efficace.
La méthadone est le traitement destiné aux usagers pharmaco-dépendants aux opiacés le plus évalué et le plus efficace : « Etant donné la nature chronique, sujette à rechute, de la dépendance aux opiacés et les résultats à long terme généralement décevants du sevrage associé à une prévention des rechutes, le traitement de substitution par agoniste est devenue la forme de traitement la plus importante de la dépendance aux opiacés » [24].
Prise en compte des résultats du programme-pilote avec prescription d’héroïne dans le développement ultérieur des systèmes d’assistance aux toxicomanes
Bien que la mise en application des TSO ait obtenu des résultats très positifs en Allemagne, un pourcentage de participants n’a tiré aucun avantage de ce traitement. Cela a ouvert le débat sur la diversification du TSO à la méthadone, en particulier pour les toxicomanes non-répondants (à savoir qui ont abandonné le traitement à la méthadone ou qui n’ont pas réagi à ce traitement).
Prescription d’héroïne
Les résultats positifs de l’étude réalisée en Suisse avec prescription d’héroïne ont ouvert la voie à une étude clinique randomisée en Allemagne [25].
Les résultats de l’évaluation scientifique du projet-pilote allemand sur le traitement des consommateurs d’opiacés avec prescription d’héroïne ont été récemment rendus [26]. Ils suggèrent que le traitement soit proposé aux usagers avec une dépendance élevée à l’héroïne qui ne réagissent pas ou qui n’ont pas bien réagi au traitement de substitution à la méthadone. Seuls les consommateurs d’opiacés pour lesquels la substitution par la méthadone s’était révélée inefficace (souvent à plusieurs reprises) ou qui n’avaient pas suivi le traitement au moins pendant 6 mois avant de commencer le traitement à l’héroïne ont été admis à participer au programme-pilote.
Cette étude a été réalisée dans sept grandes villes allemandes avec la participation de 1032 patients dans les centres d’étude, entre 2003 et 2005. L’un des groupes étudiés a reçu de la diamorphine (héroïne) et l’autre groupe de la méthadone.
Par ailleurs, les deux groupes ont bénéficié d’un suivi psychosocial. Le taux de rétention pour le traitement à l’héroïne a été de 67% après 12 mois, à savoir légèrement inférieur au taux enregistré par les études menées en Suisse et aux Pays Bas. Sur le groupe traité à la méthadone, seuls 39% des participants ont suivi le traitement jusqu’au bout, principalement à cause du fait qu’un tiers des patients randomisés du groupe de contrôle ne s’est pas présenté au début du traitement. Il faut également tenir compte du fait que, lors de l’examen à 12 mois, 39% des participants du groupe héroïne et 44% des participants du groupe méthadone qui avaient abandonné le traitement dans le cadre de l’étude étaient encore en TSO en dehors de l’étude ou dans d’autres contextes de traitement des addictions.
Quels ont été les principaux résultats de l’étude ? Le groupe d’héroïnomanes très dépendants a été recruté avec succès. La définition de la réponse a été une amélioration de 20% de l’état de santé, une forte diminution de la consommation d’héroïne à l’extérieur et aucune augmentation de la consommation de cocaïne.
Au bout de 12 mois, le traitement à l’héroïne a donné des résultats nettement meilleurs en ce qui concerne l’amélioration de l’état de santé et la réduction de la consommation de drogues illicites que le traitement à la méthadone. Les effets ont été largement indépendants du groupe cible, des formes de suivi psycho-social et du centre d’étude concerné. La baisse de la consommation de cocaïne a été enregistrée dans les 2 groupes. L’étude montre que le traitement à l’héroïne peut être mis en place en toute sécurité et avec des résultats efficaces.
Aucun décès lié à l’étude n’a été signalé. Le taux de mortalité a été identique dans les deux groupes et tous les décès étaient dus à des maladies préexistantes. Cependant, le risque plus élevé pour la santé chez les patients du groupe héroïne (la substance étant injectée par voie intraveineuse) nécessite un traitement dans des unités de jour spéciales et semble exclure un traitement à la maison.
Le traitement à l’héroïne s’est révélé sensiblement meilleur que le traitement à la méthadone pour le groupe des consommateurs de longue durée qui n’avaient retiré aucun avantage du traitement de substitution à la méthadone et d’autres formes de traitement en ce qui concerne l’amélioration de l’état de santé et la diminution de la consommation de drogues illicites. La prescription d’héroïne a entraîné une diminution considérable de la criminalité liée à la consommation de drogues, ce qui est un bénéfice supplémentaire important.
Suivi psychosocial – expériences et attentes des patients
Les règles en matière de traitements de substitution en vigueur en Allemagne exigent la participation obligatoire des patients à un suivi psycho-social, bien que la nécessité d’un tel accompagnement pour tous les patients n’ait pas été formellement prouvée [27]. Cependant, ces règles ne prévoient aucune instruction quant à la fréquence, au mode et à l’étendue des prestations de suivi psychosocial et il n’existe, à ce jour, aucune norme à l’échelle nationale concernant l’organisation et la structure de ce type de mesure d’accompagnement.
Le suivi psycho-social est une définition unique qui englobe différents types de services, pouvant inclure, par exemple, le conseil juridique, la gestion des problèmes financiers (dettes, loyers), les activités récréatives, l’intervention en cas de crise, des séances de groupe (psychothérapeutiques), l’aide dans la recherche de logement ou d’emploi et l’admission à des programmes scolaires et à des stages de formation professionnelle. Le suivi psycho-social n’est pas financé par la Sécurité Sociale. La disponibilité du suivi psychosocial varie beaucoup d’un land à l’autre et d’une collectivité à l’autre, tout comme la qualité et le financement de ces services.
Des interventions spécifiques de type cognitif/comportemental peuvent aider à réduire la consommation d’autres substances psychoactives [28]. Une autre stratégie possible est le Contingency Management (par ex. des bons d’achats divers ou des doses à emporter à domicile sont accordés pour chaque analyse d’urine sans trace de drogues. Une étude randomisée multi-centrique est en cours [29].
On ressent à l’échelle mondiale un déficit d’études qualitatives sur les opinions personnelles des patients soumis au TSO. Les attitudes et les opinions des participants au traitement méritent une étude attentive, car l’obtention de meilleurs résultats dépend en grande partie de l’élaboration de stratégies orientées vers les besoins des patients [30,4].
Ceci transparaît clairement des rapports des clients : « Les médecins ne connaissent les effets et les effets secondaires que d’après les livres, mais c’est nous qui sommes les experts en la matière. Par exemple, le médecin dit que tous ceux qui prennent de la méthadone ressentent la même chose, mais ce n’est pas vrai » [31].
Le suivi psycho-social peut aider les patients à reconstruire leur vie autrement, car la pression exercée sur le patient par la nécessité de se procurer la drogue est nettement réduite. Cependant, parfois, la mise à nu de certains problèmes importants peut mener à une situation de crise, car la confrontation du patient avec des blessures, des maladies et d’autres expériences négatives de son existence passée peut être extrêmement douloureuse. La disparition d’activités quotidiennes (généralement très accaparantes) ayant pour but le financement et la consommation de la drogue, la perte des effets euphorisants de substances telles que l’héroïne et les conséquences de graves maladies (double diagnostic, infections virales) ainsi que des perspectives restreintes pour le futur peuvent induire souvent un état dépressif. Certains patients deviennent apathiques et incapables de structurer leur vie. Certains, par exemple, passent leur journée à regarder la télé.
Les anciens réseaux sociaux n’ont plus la même importance qu’auparavant. Il n’est pas facile de mettre de la distance par rapport au monde de la drogue et de construire une nouvelle vie lorsque l’on rencontre « de vieilles connaissances » chaque jour au cabinet du médecin qui suit le traitement. La consommation d’alcool et la prise de benzodiazépines, par ailleurs, peuvent fonctionner comme une sorte d’automédication contre la dépression mais elles ont souvent l’effet contraire [32].
Il est également difficile d’améliorer sa vie familiale sans l’aide d’un professionnel, car l’intégration familiale joue un rôle ambivalent. Les expériences familiales de la petite enfance font généralement « partie du problème ». La participation de la famille est cruciale en vue du succès du traitement, mais sa dynamique ne peut être comprise et affrontée qu’avec l’aide d’un psychologue.
Délivrance du traitement de substitution
On considère qu’environ 90% des patients qui suivent un TSO en Allemagne reçoivent le médicament d’un médecin généraliste dans un cabinet indépendant, et non pas dans une clinique. Cependant, ces cabinets se sont spécialisés et leurs patients sont presque exclusivement des usagers de drogue.
Dans une étude réalisée au printemps 1996 dans une région d’Allemagne de l’Ouest, 70% de tous les prescripteurs de méthadone agréés par la Sécurité Sociale (à savoir 598 médecins) de la région étaient des médecins généralistes, 20% des médecins spécialistes (médecine interne) et 6% des psychiatres [33].
Environ 50% des médecins généralistes prescripteurs de traitements à la méthadone ont jusqu’à 10 patients, 40% jusqu’à 40 patients et 10% plus de 40 patients.
78% des 61 000 patients enregistrés en 2005 ont eu leur traitement en ambulatoire par le biais de services spécialisés (dotés de leur propre personnel soignant), 20% dans des cabinets qui traitaient également d’autres types de patients mais offrant des services spécifiques pour les usagers de drogue et (seulement 4%) dans des cabinets médicaux « normaux » de médecins de famille en ville [34].
Sous la houlette de l’Association des pharmaciens allemands, les médicaments de substitution peuvent être légalement administrés par les pharmacies depuis 1998.

Médicaments prescrits
Lorsque les TSO ont commencé à être administrés en Allemagne, seule la levo-méthadone était utilisée.
Maintenant, la méthadone, la buprénorphine et, dans certains cas exceptionnels, la codéine et la déhydrocodéïne peuvent également être prescrites. Le LAAM ou lévactétylméthadol (Orlaam®) n’est plus employé en Allemagne en raison de ses effets secondaires dangereux (troubles cardiaques pouvant entraîner le décès) [35-36].
La méthadone est la substance la plus fréquemment prescrite dans les traitements de substitution.
Contrairement aux autres pays, deux types de méthadone sont disponibles en Allemagne, le mélange racémique (d,l-méthadone) (disponible seulement depuis le 1er février 1994) et la levo-méthadone (1- méthadone, M-Polamidon). Hormis les traitements de substitution, la méthadone peut également être utilisée dans le cadre de sevrage au sein d’unités agréées où les posologies sont progressivement réduites sur une période allant de une à trois semaines.
En ce qui concerne la codéine/DHC, une étude de suivi a montré que le traitement de substitution à la méthadone et le traitement à la codéine/DHC ont une efficacité similaire en termes d’évolution du traitement et de résultats [37-38]. Cependant, la codéine ne joue plus aucun rôle dans les traitements de substitution. En effet, en raison d’une modification de la loi due à de graves problèmes causés par une vaste diffusion incontrôlée du « jus de codéine » – le nombre de patients traités à la codéine/DHC est passé de quelques 25/30 000 patients début 1998 à 5 000 patients en 2001 et à moins de 500 en 2005.
En revanche, la buprénorphine (Subutex®) a été plus fréquemment administrée. Ce médicament a été autorisé dans les traitements de substitution par l’Institut Fédéral des Stupéfiants et des Dispositifs médicaux (Bundesinstitut für Arzneimittel und Medizinprodukte) début 2000. Il a été suggéré que la buprénorphine pourrait être particulièrement utile chez les femmes enceintes et les patients auxquels on administre une faible posologie de méthadone [39]. La buprénorphine semble également efficace dans le cadre des sevrages [40].
Un rapport récemment publié par une clinique de Hambourg sur les expériences réalisées avec la buprénorphine (31% des cas) par rapport à la méthadone (69%) en traitement de sevrage semble suggérer que les deux substances sont également indiquées. Cette étude a été réalisée sur 800 patients entre 2000 et 2004. Globalement, aucune différence significative n’a été découverte en ce qui concerne le taux de rétention (méthadone : 52% ; buprénorphine : 59%). Pendant la période de sevrage de la méthadone, 8 patients sur dix ayant suivi un TSO à la méthadone de longue durée ont manifesté des symptômes de manque nettement moins importants sous buprénorphine.
L’emploi de la buprénorphine chez les femmes enceintes pharmaco-dépendantes a réduit considérablement ou totalement les syndromes d’abstinence néonatale.
Les patients traités par la buprénorphine au lieu de la méthadone étaient plus lucides, ce qui n’a pas été vécu comme un facteur positif par tous les patients et qui pourrait avoir eu des effets négatifs sur une éventuelle co-morbidité psychiatrique.

Grâce à une approche extrêmement prudente, surtout en phase de changement des médicaments, aucun cas d’overdose n’a été constaté pendant la période concernée par l’étude [41].Plusieurs études ont montré que la buprénorphine est efficace dans le traitement de substitution des toxicomanes consommateurs d’opiacés |23, 42]. Cependant, aucune étude comparative n’est disponible sur les taux de rechute après la désintoxication.
Le tableau ci-avant indique la place respective des différents traitements en Allemagne
Une « règle d’or » dans les traitements de substitution est de ne pas se concentrer sur une substance précise, mais sur le protocole de traitement pour chaque individu.
Dans une étude autrichienne [43], les patients traités par de la morphine L.P. dans le cadre de traitements de substitution ont eu des taux les plus faibles de consommation d’héroïne (22,4% contre 35,1%), de cocaïne (40,9% contre 58,3%) et de benzodiazépine (74,1% contre 88,9%) par rapport aux patients traités à la méthadone. Les résultats confirment ceux d’autres études indiquant que la morphine L.P. peut constituer une alternative très appréciée des patients dans le cadre des TSO.
Cependant, à ce jour, cette substance n’est pas disponible comme TSO en Allemagne. Une « règle d’or » dans les traitements de substitution est de ne pas se concentrer sur une substance précise, mais sur le protocole de traitement pour chaque individu adapté aux besoins du patient, sur des règles claires, des objectifs atteignables et une bonne relation patient-médecin [44].
Le traitement de substitution dans les prisons
Selon la loi allemande, la consommation de stupéfiants en tant que telle n’est pas un délit. Cependant, les personnes qui sont en possession de drogues pour leur usage personnel et qui ne sont pas en mesure de présenter une autorisation écrite d’achat sont considérées en infraction selon la Loi sur les Stupéfiants (il s’agit du délit dit de « consommation personnelle), comme toute personne qui cultive, produit et fait du commerce de produits stupéfiants ou les met sur le marché sans une autorisation officielle.
En Allemagne, il y a environ 80 000 détenus dont 25% sont considérés comme des usagers de drogue problématiques. Jusqu’à 50% des détenus ont consommé de la drogue (surtout du cannabis). Selon la Loi Carcérale allemande, chacun des 16 Länder doit fournir aux détenus des soins médicaux adéquats, conformes aux standards des soins accessibles hors de prison.
Le traitement de substitution peut être efficace s’il est pratiqué suffisamment longtemps, s’il est de bonne qualité et si le détenu continue à le suivre même après.
Un grand nombre de détenus ont consommé dans le passé des drogues injectables et un plus petit pourcentage d’entre eux continue à consommer des opiacés, bien que moins fréquemment, même en prison.
Malgré des contrôles stricts, on estime que 50% des détenus usagers de drogues injectables continue à se droguer même en prison [45].
Cette pratique est associée à un risque élevé de contracter le HIV et l’hépatite en partageant le matériel utilisé pour l’injection : en effet, les seringues et les aiguilles stériles sont rarement disponibles en prison. Etant donné cette situation, il est évident que des mesures préventives doivent être mises en place au sein du système carcérale. Le traitement de substitution peut être efficace s’il est pratiqué suffisamment longtemps, s’il est de bonne qualité et si le détenu continue à le suivre même après. Depuis, conformément aux « Instructions concernant le HIV et le SIDA dans les prisons (O.M.S., 1993) [46], qui recommandent que « les détenus qui suivaient un TSO à la méthadone avant l’incarcération doivent pouvoir poursuivre le traitement même en prison », les TSO sont devenus disponibles dans les prisons allemandes.
Cependant, leur mise en oeuvre se fait sous la responsabilité de chacun des 16 Länder allemands et varie d’une prison à l’autre.
Par ailleurs, cette pratique comporte des différences par rapport au traitement administré hors de prison [47-48]. Les détenus, en tant que patients, n’ont pas le droit de choisir leurs médecins ; il est impossible d’isoler les patients des autres détenus appartenant à « l’univers de la drogue » et souvent le personnel a une attitude négative vis-à-vis des TSO. Seuls, 6 des 16 états fédéraux proposent les TSO dans les prisons. On estime à 700 le nombre de détenus participant à des TSO, alors qu’au moins 1/3 des 100.000 consommateurs de drogues injectables présents en moyenne dans les prisons chaque jour devraient y avoir droit. Les critères d’admission varient d’un land à l’autre et souvent, les TSO à visée de maintenance ne sont pas proposés.
Les TSO font généralement partie intégrante d’un plus vaste concept de soins à visée d’abstinence, afin d’améliorer l’accès à d’autres traitements après la sortie de prison, ainsi que la prévention des rechutes. Le suivi psycho-social est assuré par des travailleurs sociaux venant de l’extérieur, mais, en raison du manque de ressources financières suffisantes, il incombe souvent au personnel des prisons. Parfois, les groupes d’auto-support extérieurs (groupes d’auto-support aux malades du SIDA ou aux UD) sont autorisés à prêter leur assistance aux détenus dans le cadre du traitement.
Le système carcéral fait preuve de lenteur dans sa réponse aux épidémies de maladies infectieuses d’origine virale et à la consommation de drogues injectables. Toutefois, l’on sait que le TSO est une réponse efficace pour la réduction des risques et des dommages, par le biais de la réduction de la consommation d’héroïne, du partage des seringues et des aiguilles et du trafic de drogue à l’intérieur des prisons. Par conséquent, la mise à disposition du traitement de substitution devrait être élargie [49].
Le rôle des TSO dans le traitement du HIV et de l’hépatite parmi les toxicomanes
Les UD sont le deuxième groupe à risque le plus important parmi les personnes infectées par le HIV en Allemagne (le groupe le plus important étant les homosexuels de sexe masculin), alors que le groupe des hétérosexuels et des gens provenant de pays à risque est presque aussi important que celui des UD). Selon le Robert Koch Institute [50], l’incidence du HIV est de 5,8% (2003 :7,0%) dans le groupe des UDI (Usagers de Drogues Injectables). Le taux était de 10% jusqu’en 2000 tandis qu’au milieu des années 80 l’incidence était de 20%. Dans certaines grandes villes, le pourcentage de HIV diagnostiqué parmi les UDI était de 50- 60%. Ce pourcentage avait chuté de manière significative en raison de structures bas-seuil et de la mise en place de TSO à la méthadone. Les données fournies actuellement font ressortir une prévalence de 3,7%.
Cependant, il manque d’études récentes, sur de larges cohortes, qui permettraient une certaine généralisation des données.
En 2004, on peut estimer que l’injection était la cause probable d’infection dans moins de 10% des nouveaux cas et que, globalement, moins de 5% des consommateurs de drogues injectables étaient séropositifs en 2004.
En ce qui concerne les cas d’hépatite C, la consommation de drogues par IV à tout moment dans le passé a été citée le plus souvent – pour 37% des cas – comme la voie d’infection la plus probable.
Des données de base sur l’hépatite virale sont disponibles pour la population générale. Selon le rapport Fédéral sur la Santé [51], 5 à 8% de la population allemande âgée de 18 à 79 ans a été infectée par le virus de l’hépatite B. Un total compris entre 0,5 et 0,7% de la population est porteur d’anticorps de l’hépatite C.
En ce qui concerne les voies de transmission possibles, la consommation de drogues par intraveineuse a été évoquée pour 7% des cas d’hépatite B. En ce qui concerne les cas d’hépatite C, la consommation de drogues par IV à tout moment dans le passé a été citée le plus souvent – pour 37% des cas – comme la voie d’infection la plus probable. Dans le groupe des hommes d’âge compris entre 20 et 29 ans, la consommation de drogues par IV a été citée dans 71% des cas. Une étude sur la vaccination, réalisée dans le milieu des UD sur un échantillon de 701 personnes, a fait ressortir une prévalence d’anticorps de 38,6% pour l’hépatite A (anti-HAV), de 2,1% pour l’hépatite B (HBs-Ag) et de 34,1% (anti-HBC) ainsi que de 47,5% pour l’hépatite C (anti-HCV). Seul un UD sur cinq savait qu’il avait été contaminé [52].
Une étude menée sur 1 512 consommateurs d’opiacés participant à un traitement dans une clinique de Munich a fait ressortir les résultats suivants (pourcentage d’hommes : 85% ; âge moyen 27,7 ans, durée de la consommation d’héroïne : 7,8 ans, consommateur de drogue injectable pendant 6,7 ans) : l’hépatite A a été dépistée chez 57,7% des patients, le HBV chez 33% et le HCV chez 75%. La réaction positive au HBV et au HCV coïncidait, respectivement, avec l’âge, la durée de la consommation de drogues par voie intraveineuse et le nombre de sevrage [53].
Le TSO est le point de départ du traitement des maladies liées au virus HIV/sida chez les UD. De forts taux de rétention ainsi que le respect des instructions relatives au traitement facilitent le traitement par les antirétroviraux en étroite collaboration avec des services d’infectiologie.
En conclusion, la prévalence des anticorps (taux d’infection) de l’hépatite B parmi les UDIV en Allemagne peut être estimée à 40-60% et pour l’hépatite C, entre 60 et 80%. Alors que les données ne permettent pas une estimation précise, il est assez évident que la prévalence des anticorps chez les UDIV est très élevée en ce qui concerne l’hépatite B et C.
Le TSO est le point de départ du traitement des maladies liées au virus HIV/sida chez les UD. De forts taux de rétention ainsi que le respect des instructions relatives au traitement facilitent le traitement par les antirétroviraux en étroite collaboration avec des services d’infectiologie [54]. Les TSO de longue durée permettent d’observer l’évolution du traitement antirétroviral et de mieux répondre aux effets secondaires générés par ceux-ci. De nombreuses interactions sont possibles entre les antirétroviraux et la méthadone et d’autres médicaments de substitution, qui rendent nécessaire une adaptation de la posologie de méthadone.
Les propriétés analgésiques des opiacés peuvent masquer parfois les premiers symptômes de graves effets secondaires des médicaments anti-HIV.
De bonnes relations entre le médecin et le patient sont essentielles afin de résoudre ces problèmes. Les résultats d’une étude rétrospective du traitement antirétroviral des UD (A) et des homosexuels (B), réalisée dans un centre de soins de Berlin, étaient globalement similaires pour les deux groupes, à l’exception du fait que les UD présentaient un taux de comorbidité psychiatrique plus élevé. Au bout de 12 mois de traitement, la charge virale était descendue en dessous de la limite de détection pour 44% du groupe A, par rapport à 51% dans le groupe B.
Cependant, le taux de mortalité du groupe des UD était nettement plus élevé en raison des décès dus à des problèmes cardiaques (endocardite) ou hépatiques (hépatite) [55]. Cependant, le respect et le suivi de la thérapie antirétrovirale dépendent de nombreux facteurs, tels que de bonnes relations patient/médecin, la prévalence de troubles psychiatriques, le niveau d’estime de soi du patient, etc.
Bien que, par le passé, en Allemagne, les UDIV aient été globalement exclus, de la bi-thérapie anti-HCV (Interféron-Ribavirine), des résultats plus récents semblent suggérer une approche différente [56-57]. Des comparaisons ont été faites sur l’utilisation des médicaments chez les UD et les non-UD sur la base des critères suivants, à savoir : le taux de réponse, les résultats du traitement anti-HCV et la gravité des effets secondaires de nature neuro-psychologique .
- Une étude prospective contrôlée réalisée en 2003 [58] n’a fait ressortir aucune différence en ce qui concerne les complications psychiatriques et les taux de réponse entre les personnes présentant des troubles liés à la consommation de drogue ou psychologiques et un groupe de contrôle ne présentant pas ce type de trouble. Malgré cela, les UD présentaient un taux plus élevé d’abandon.
- Dans le cadre d’une étude prospective contrôlée réalisée en 2004 [59], le résultat du traitement de 50 patients sous TSO avec la méthadone a été comparé à celui d’un groupe de contrôle formé de personnes sans problème d’addiction sur une période de 5 ans. Aucune différence significative n’a été détectée entre les deux groupes ni en ce qui concerne le taux de rétention, ni en ce qui concerne le taux de réponse.
- Dans un groupe de 40 consommateurs d’héroïne présentant de graves symptômes [60], les taux de réponse relevés étaient similaires à ceux de la population générale.
Les résultats de ces études et d’autres encore [61-62] suggèrent que les consommateurs de drogues injectables séropositifs peuvent être traités avec succès par une thérapie standard. Les effets secondaires et les taux de réponse correspondent aux chiffres relevés pour la population générale. Le suivi concomitant d’un TSO ne constitue pas un obstacle si la gestion des deux thérapies est étroitement coordonnée [63].
Même dans le cas de troubles psychologiques secondaires légers ou modérés, le traitement anti-HCV peut être suivi avec succès à condition qu’il soit organisé de manière pluridisciplinaire [64]. En règle générale, le TSO à la méthadone est une condition requise préalable du succès d’un traitement anti-viral (HCV, HIV) chez les usagers pharmaco-dépendants aux opiacés [65].
Discussion
Les TSO à la méthadone ont été introduit, pour la première fois, en Allemagne en 1987, après une longue controverse à ce sujet. Le nombre de patients soumis à ce traitement – d’abord faible à cause de critères d’admissions très stricts – a augmenté de façon considérable depuis les années 1990 pour atteindre le nombre d’environ 65 000 patients fin 2006.
L’un des objectifs importants de la politique de santé est de faire au mieux pour prévenir ou, du moins, réduire de manière considérable dans notre société, les modes de consommation à risque ou nocifs, de substances addictives. Par conséquent, la prévention de la dépendance occupe une place importante dans les efforts poursuivis par les politiques de santé. Cependant, un autre objectif consiste à identifier très tôt les modes de consommation à risque et à savoir les limiter, à assurer la survie des personnes dépendantes et à traiter les cas de dépendance par tous les moyens disponibles en l’état actuel des connaissances scientifiques, de l’abstinence à une thérapie assistée dans un cadre médical. La dépendance est une pathologie qui nécessite un traitement.
En Allemagne, les UD ont un droit légal à l’assistance.
Les organismes de sécurité sociale (assurance sociale, organismes de retraite, institutions chargées de l’assistance sociale, municipalités) ont l’obligation de financer cette assistance. Au cours des dernières décennies, ces organismes ont réussi, avec l’aide des prestataires de services et des groupes d’auto-support, à mettre à la disposition des UD différents structures de soins et d’aide aux sujets dépendants. Au cours des 30 dernières années, un système différencié de très grande qualité a été développé en Allemagne dans le domaine de l’aide aux sujets dépendants.
Ce système comprend des formes d’aide sur le terrain à bas seuil d’exigences, du ‘counseling’ pour les patients ambulatoires, des traitements de sevrage spécifique, des sevrages en milieu hospitalier avec un suivi postsevrage, une aide après la sortie de l’hôpital dans le cadre de mesures de réinsertion (par exemple : resocialisation des patients, appartements thérapeutiques, projets de réinsertion professionnelle, et groupes d’auto-support). Ces offres sont complétées par un suivi médical ambulatoire avec délivrance de médicaments spécialement conçu pour les consommateurs d’opiacés.
La coopération entre les médecins de ville et le système d’aide aux UD doit être promu à l’interface avec les soins aux malades en urgence. Enfin, les choix thérapeutiques (à savoir quel traitement est le plus adapté à un patient ou même à un sous-groupe) constitue une question essentielle en termes de recherche [66].
Cependant, le TSO joue un rôle essentiel dans le système de soins destiné aux UD en Allemagne.
Conclusions
Une expérience considérable a été accumulée en Allemagne au cours des 20 dernières années en ce qui concerne les TSO,
- par exemple dans le développement des structures de soins ;
- dans le développement de Guidelines et de mesure d’Assurance-qualité;
- dans la mise en application pratique du traitement de substitution tenant compte des effets secondaires et des éléments du traitement tels que l’histoire de la consommation de drogues, la définition des posologies, la prise d’autres substances psychoactives (alcool, benzodiazépine, cocaïne), la gestion des « populations de patients difficiles » et l’intégration dans l’environnement social ;
- dans le développement de programmes spécialement conçus en vue de la mise en place de thérapies psychosociales d’accompagnement du traitement de substitution et, dans le cadre du projet-pilote relatif au « traitement avec prescription d’héroïne », également avec des manuels standardisés ;
- dans la recherche visant à trouver la thérapie la plus adaptée à chaque patient à un moment donné [66] ;
- dans le cadre du projet-pilote relatif au « traitement avec prescription d’héroïne », à travers l’expérience accumulée avec les patients qui ne réagissent pas ou ne réagissent pas positivement au traitement à la méthadone ;
- à travers la compétence acquise dans le traitement de certaines co-morbidités, telles que le HIV/sida, les hépatites et les troubles psychiatriques ;
- dans la pratique des TSO dans les prisons en europe ;
- dans la promotion et la participation des groupes d’auto-support, qui sont très importants ;
- dans la production, la concession de licences, la distribution et le contrôle de MSO, y compris, entre autres, l’instauration d’un registre des thérapies de substitution ;
- dans l’établissement d’une coopération au développement alternatif mise en place dans le cadre du programme « entwicklungsorientierte Drogenkontrolle » (contrôle de la drogue orienté vers le développement) lancé par le GTZ, l’Agence Allemande pour la Coopération Technique ;
- dans le cadre de la coopération avec le Observatoire Européen des Drogues et des Toxicomanies (EMCDDA) en vue du développement de normes européennes relatives au TSO.
L’utilisation de drogues doit être évitée autant que possible ou, du moins, réduite au maximum, en associant des mesures préventives, thérapeutiques et répressives. La coopération entre les spécialistes de la toxicomanie et les systèmes classiques d’aide publique (aide aux jeunes, aide aux chômeurs) doit être ultérieurement développée afin d’améliorer l’efficacité du financement public des traitements. L’assurance qualité du traitement est un outil important en vue de l’amélioration des résultats du traitement.
Le TSO est devenu un élément nécessaire et le plus important du processus de traitement en Allemagne. Le TSO est largement employé non seulement en Allemagne mais partout en Europe. Après la fin des années 80, le nombre de TSO à la méthadone a commencé à croître.
En 2001, 24 pays de l’Union Européenne ainsi que la Bulgarie, la Roumanie et la Norvège avaient introduit dans leur système le TSO à la méthadone. Depuis le milieu des années 90, la buprénorphine est également devenue un élément important des TSO en Europe [67]. Il a été estimé qu’environ 600 000 consommateurs d’opiacés, à savoir plus de la moitié du nombre estimé de ces toxicomanes en Europe, ont accès aux TSO.
Mais, à l’avenir, la dynamique la plus importante doit être développée en Asie et en Europe de l’Est. Plus de la moitié des consommateurs mondiaux d’opiacés vivent en Asie et, même si le nombre de consommateurs de drogue par habitant est inférieur à celui de l’Europe, les chiffres bruts des personnes dépendantes aux opiacés ont augmenté de manière spectaculaire au cours des dix dernières années.
On estime à plus de 3 millions le nombre actuel d’héroïnomanes en Chine (1,4 millions sont officiellement enregistrés), à 2-4 millions de consommateurs d’opiacés en Iran, à plusieurs centaines de milliers en Inde et au Pakistan, à plus de 170 000 au Vietnam, à plusieurs centaines de milliers en Asie Centrale, à 3 millions dans la Fédération de Russie et à 380 000 en Ukraine [68]. Dans presque tous ces pays, mis à part la Russie qui refuse encore maintenant d’autoriser les traitements de substitution, de nouveaux programmes de substitution pour la plupart à base de méthadone ont été mis en place ou sont en cours de mise en place.
L’Etude Collaborative de l’O.M.S. sur le traitement de substitution de la dépendance aux opiacés et le HIV/SIDA dans les pays en voie de développement en Asie et dans les pays en mutation en Europe [69] a présenté des résultats convaincants du traitement de substitution à la méthadone : à la fois l’état de santé et la qualité de vie des patients soumis au traitement se sont sensiblement améliorés ; la gravité de la dépendance a nettement diminué de plus de 50% tout comme le développement des états dépressifs ; le taux de prévalance des infections à HIV et de l’hépatite C n’a pas augmenté.
Par ailleurs, les modèles de consommation à haut risque, tels que l’injection, ont sensiblement diminué, les taux de rétention étaient très élevés au bout de six mois, même la dose moyenne de méthadone était moins élevée en Asie qu’en Europe. Le traitement de substitution à la méthadone s’est révélé efficace en vue de la réduction de la consommation illicite d’opioïdes. Les programmes de thérapie de substitution à la méthadone devraient trouver une application de plus en plus vaste dans les années à venir.
La future coopération avec les pays européens, entre autres avec l’Allemagne, sera nécessaire non seulement en raison des expériences positives déjà accumulées mais aussi afin d’éviter les erreurs et les échecs.
Référence disponibles sur : http://www.harmreductionjournal.com/content/4/1/5
Intérêts conflictuels
Aucun intérêt conflictuel n’a été détecté.
Remerciements
Nous remercions Robert Newman pour son analyse critique et ses précieuses remarques.