L’hépatite C aux Etats-Unis, tout comme dans le reste du monde, est un problème de santé publique majeur. 3,2 millions d’Américains seraient infectés de manière chronique, le VHC étant la principale cause de décès d’origine hépatique. Bien que les nouveaux traitements disponibles soient efficaces, ils ne peuvent être utilisés qu’à partir du moment où un diagnostic est établi.
Ainsi, 45% à 85% des patients atteints d’hépatite C (VHC) n’auraient pas connaissance de leur infection.
Dans ce contexte, le Dr Mari-Lynn DRAIONI et son équipe ont publié fin 2012 dans l’American Journal of Public Health, une étude allant dans le sens d’une amélioration du taux de diagnostic.
Selon les sources, recommandations officielles ou données de la littérature, plusieurs critères semblent être significatifs d’un risque accru de VHC. Parce que les recommandations ne sont pas concordantes, les auteurs ont élaboré un outil d’évaluation sous forme de questionnaire sélectionnant un nombre restreint de facteurs (12).
Il n’existe actuellement aucun outil validé permettant de déterminer l’intérêt d’un dépistage selon les profils de patients. L’étude a porté sur l’évaluation d’un questionnaire rapide, qui pouvait être complété à l’occasion d’une consultation. Trois centres de médecine générale ont participé entre novembre 2008 et mars 2009. Il était demandé aux professionnels de faire compléter le questionnaire à tous les patients n’ayant pas effectué de dépistage du VHC durant les 12 derniers mois. Lorsque qu’un patient présentait un ou plusieurs facteurs de risque, une recherche d’anticorps anti-VHC était effectuée.
L’objectif de l’étude était donc d’évaluer la capacité du questionnaire à promouvoir un dépistage du VHC et à faciliter l’identification des patients positifs.
Résultats
Sur un total de 13 371 patients accueillis dans l’une des trois structures, 3 250 ont complété le questionnaire et été inclus dans l’analyse :
- 27,8% (n = 902) présentaient au moins un facteur de risque. 55,4% de ces patients ont effectué un dépistage pour le VHC qui s’est révélé positif dans 6,8% (34/500) des cas ;
- Pour les 2 348 patients ne présentant aucun facteur de risque, 13,7% (n = 322) ont été dépistés pour le VHC et 2,2% (7/322) ont été positifs.
L’étude a également permis de préciser quels facteurs étaient les plus déterminants quant au risque d’hépatite C. Sur les 12 facteurs initiaux, 7 ont été suffisants pour prédire plus de 80% des cas de VHC.
Le seul fait d’avoir consommé des substances par voie intraveineuse était prédictif de plus de 40% des cas de séropositivité. De même, 3 facteurs (usage par voie intraveineuse, usage par voie intranasale, et ALAT élevées) ont été prédictifs de plus de 2/3 des cas de VHC dépistés.
Ces résultats semblent cohérents avec une précédente étude (La National Health and Nutrition Examination) qui a montré que l’usage par voie intraveineuse, des ALAT élevées et être transfusé avant 1992 étaient prédictifs de 85% des cas de positivité au VHC.
En conclusion, les auteurs rappellent que cet outil a incité au dépistage : plus d’un patient sur deux présentant un facteur de risque a été testé. En effet, le questionnaire s’est montré efficace dans l’amélioration du taux de dépistage chez tous les patients suivis et plus particulièrement chez les sujets à risque.
Par ailleurs, cet outil, sous réserve d’une validation par l’intermédiaire d’études ultérieures, pourrait se révéler particulièrement adapté dans un contexte (ndlr : aux Etats-Unis d’après l’article) accordant une place de plus en plus importante aux activités de prévention et à la nécessité d’outils simples, fiables et rapides à utiliser.
En France, ce questionnaire pourrait ainsi venir en complément d’une stratégie promouvant une mise à disposition des TROD (Tests Rapides à Orientation Diagnostique) en médecine libérale comme dans les structures d’accueils des usagers de drogues (CAARUD, CSAPA).
Commentaires du Dr Xavier AKNINE, médecin généraliste et président de l’ANGREHC
Cette étude confirme la difficulté du dépistage de l’hépatite C en médecine de ville, en soins primaires puisqu’il s’agit d’un dépistage ciblé sur des personnes venant en consultation et ayant un ou plusieurs facteurs de risques.
Dans l’étude présentée, près de 30% des consultants en médecine générale avaient au moins un facteur de risque et seuls 55% d’entre eux ont fait le dépistage du VHC.
Peut-être que la peur du prélèvement veineux ou un problème de capital veineux explique cette part limitée de patients accédant au dépistage.
Sur ce point, les TROD VHC peuvent apporter une plus-value indiscutable en médecine générale et dans les CSAPA et CAARUD.
Sur les facteurs de risque identifiés, l’étude montre que l’usage de drogues par voie intraveineuse a une valeur prédictive positive de 40% pour le résultat du test VHC. On n’est pas très étonné par ce chiffre.
En France, c’est le facteur de risque principal.
Concernant la faisabilité du questionnaire en médecine de ville, de premier recours, ce n’est pas si simple, car il aborde des questions comme l’usage de drogues qui est difficile à verbaliser ou à reconnaître d’emblée par le patient. Il y a un risque évident de sous-déclaration de ce comportement actuel ou passé.
En revanche, au fil des consultations, quand un lien de confiance se sera instauré entre le patient et le médecin, ce facteur de risque majeur pour l’hépatite C qu’est l’usage de drogues pourra être verbalisé et un dépistage du VHC pourra être proposé.
L’article évoque l’utilisation du questionnaire dans les CSAPA ou CAARUD mais c’est la mission de ces structures d’accueillir des usagers de drogues. Donc la question du recours à l’injection de drogues sera systématiquement posée lors du premier entretien et le questionnaire n’est plus nécessaire.