Cette étude anglaise, réalisée par G. Ridge et cosignée par des experts reconnus dans le domaine (Strang, Gossop, Lintzeris) a pour objectif de déterminer quels sont les facteurs pouvant potentiellement influencer la prescription de MSO (buprénorphine haut dosage ou méthadone).
Les auteurs ont ainsi étudié, auprès de 192 patients, comment d’une part la représentation du médicament, la démographie, les préférences des patients et d’autre part les modalités de traitement pouvaient influer sur la décision de prescrire la buprénorphine ou la méthadone aux patients dépendants aux opiacés.
Méthode
Les données méthodologiques ont été recueillies au travers d’une seule interview réalisée avec des patients commençant un traitement de substitution aux opiacés.
Les critères pris en compte lors de cet entretien étaient :
- (a) les informations démographiques du patient,
- (b) les objectifs de traitement définis par le patient,
- (c) le degré de préférence pour la BHD et la méthadone (évalué sur une échelle de 5 points de Likert),
- (d) les épisodes antérieurs de traitement,
- (e) l’expérience antérieure d’utilisation de médicaments (prescrits et non prescrits),
- (f) l’estimation de l’ « utilité » de la BHD et de la méthadone (évaluée sur une échelle de 5 points de Likert), la représentation du médicament,
- (g) problèmes et effets secondaires associés aux différents médicaments de substitution, et
- (h) informations obtenues concernant la BHD et la méthadone (échelle de notation par ordre d’importance).
Les données sur les modalités de traitement et de prescription de la BHD et de la méthadone, furent recueillies à la suite d’entretiens avec le personnel soignant.
Résultat
La buprénorphine a été prescrite à 25% (n = 48) des patients, et la méthadone dans 68% des cas (n = 131). Le reste de l’échantillon (n = 13, soit 7%) a bénéficié d’un autre traitement (généralement lofexidine à visée de sevrage).
En terme de préférence de traitement, les patients de cette étude privilégient la méthadone (note moyenne sur une échelle de 5 points : M ± SD = 3,9 ± 1,1) à la buprénorphine haut dosage (note moyenne sur une échelle de 5 points : M ± SD = 3,2 ± 1,4).
Les prescriptions médicales ont été influencées par les représentations (positives ou négatives) des médicaments de substitution, par les expériences antérieures de traitement, et par les objectifs en cours.
Ainsi, l’expérience personnelle des patients représente la source d’information la plus importante dans le choix du traitement et diffèrent en fonction de la méthadone ou de la BHD.
À cet égard, les avis exprimés, particulièrement au sujet de la buprénorphine haut dosage, s’appuyaient sur des ouï-dires plutôt que sur l’expérience personnelle.
Les différentes modalités de traitement et les disparités d’accès à l’un et à l’autre des MSO influencent également beaucoup sur les représentations.
Ainsi, la buprénorphine haut dosage est perçue par les usagers et les soignants comme un traitement de sevrage de courte durée, et la méthadone comme un traitement d’entretien plus long.
Commentaire de la rédaction
L’arrivée récente de la buprénorphine haut dosage en Angleterre a permis d’améliorer la vie de nombreux usagers en élargissant la gamme de traitements qui leur était proposée. Les résultats des recherches publiées à ce jour suggèrent que la BHD et la méthadone ont une efficacité comparable.
Cependant, plus que les particularités pharmacologiques, c’est le cadre d’utilisation et l’image du médicament lui-même qui semblent influer fortement sur la décision des patients et des prescripteurs.
Au-delà des résultats qu’elle apporte, cette étude pose la question des représentations vis-à-vis des deux MSO. Les indications différentielles entre les deux traitements n’ayant pas été à ce jour clairement déterminées, les attentes des patients autant que leurs croyances et expériences passées doivent être prises en compte dans le choix du MSO qui leur est prescrit.