Ce phénomène explique la sensation de bien-être ressentie après avoir bu un verre de vin.
Des travaux menés chez le rat et publiés cette semaine sur le site Internet de la revue « Alcoholism : clinical and experimental research » viennent de révéler qu’une consommation faible ou modérée d’alcool accroît la production par le cerveau des endorphines, ces précieux médiateurs chimiques – sorte de morphine endogène – secrétés par certains neurones.
Ces substances seraient à l’origine de la sensation d’euphorie induite par un verre ou deux de vin (ou d’autres alcools).
Si ce phénomène est expérimenté régulièrement par l’homme, depuis la nuit des temps ou presque, ces recherches en analysent, pour la première fois, la genèse et les mécanismes.
Christina Gianoulakis et son équipe de l’université de Mac Gill au Canada se sont intéressées à des rats à qui elles ont administré par injection, soit du sérum physiologique, soit des doses croissantes d’alcool. Elles ont mesuré ensuite, grâce à une technique sophistiquée, le taux d’endorphines et d’autres médiateurs chimiques présents dans le cerveau.
« Nous avons pu observer que les quantités faibles ou modérées d’alcool, mais pas les fortes doses, augmentent la sécrétion d’endorphines dans le cerveau et plus particulièrement dans l’aire tegmentaire ventrale, une des régions du cerveau les plus importantes pour la médiation des effets de l’alcool », explique le Dr Christina Gianoulakis.
Ce travail révèle par ailleurs que les autres neuromédiateurs de la famille des opioïdes endogènes, comme les enképhalines et les dynorphines, ne sont pas modifiés par l’alcool.
C’est sans doute cette augmentation d’endorphines qui explique la légère euphorie, la baisse de l’anxiété et le sentiment général de bien-être produit par l’absorption d’une petite quantité d’alcool.
« Les fortes doses entraînent un effet hypnotique et augmentent plutôt l’anxiété », soutient Christina Gianoulakis.
Le caractère addictif de l’alcool tient d’ailleurs sans doute à cet effet sur les endorphines.
« Ce travail confirme expérimentalement ce que l’on savait déjà intuitivement, affirme pour sa part le professeur Michel Reynaud (service d’addictologie, hôpital Paul-Brousse, Villejuif). Ainsi, un des médicaments utilisés chez les patients pour traiter leur dépendance, la naltrexone, vise à bloquer certains récepteurs aux opiacés de manière à inhiber les effets de l’alcool sur les endorphines et couper ainsi la voie du plaisir ».