Introduction
Une actualité particulièrement riche après l’été 2018 nous a incités à écrire cet article sur ce que nous continuons à appeler les médicaments de substitution opiacée (MSO), voire TAO (Traitement Agoniste Opioïde), mais pas TAO pour Traitement de l’Addiction aux Opioïdes, nouvel acronyme lourd de sens que certains essayent de mettre en avant. Nous avions exprimé il y a peu, notre avis sur la question (1).
Méthadone et Subutex© ont été mis sur le marché en France au milieu des années 90. Depuis, peu de véritables nouveautés, hormis il y a une dizaine d’années, plus ou moins :
- la mise sur le marché des génériques de buprénorphine (avec une diffusion qui est restée très limitée, peut-être aux alentours de 15-20 %, très loin des scores habituels des génériques, qui prennent souvent plus de 90 % du marché),
- l’apparition de Suboxone© qui n’a pas rencontré son public (celui attendu par la firme en tous cas) comme dans d’autres pays,
- et la mise sur le marché des gélules de méthadone qui, désormais, sont prescrites à plus de la moitié des patients bénéficiant de ce traitement.
Seul ce dernier médicament, améliorant notablement le confort de nos patients, a connu un vrai succès ‘populaire’ et commercial. Ceci expliquant peut-être cela.
Près de 10 ans après ces derniers soubresauts (et 23 ans après l’AMM de ce bon vieux Subutex©, leader incontesté des MSO en France), le marché de la buprénorphine semble en pleine (r)évolution et au moins 4 médicaments sont annoncés dans les mois qui viennent. Subutex© résistera-t-il à ce déferlement de nouvelles formules ?
Enquête auprès des Laboratoires
Une fois n’est pas coutume, nous avons proposé une liste de questions aux protagonistes que sont les firmes pharmaceutiques qui pensent en amont ces nouvelles formules et qui mettent à disposition de nos patients des MSO ou des kits naloxone (présents et à venir). Apparemment, leur contexte réglementaire ne leur permet pas ‘toujours’ de répondre à nos questions, nous ont-ils fait savoir. Nous ne souhaitions pas les mettre en difficulté ni en souffrance mais, en tant qu’acteurs dans le domaine des addictions, connaître leurs positions ou avis sur certaines questions qui ne nous paraissaient pas relever de la confidentialité. Le moins que l’on puisse dire est que, à quelques exceptions près, ils n’ont pas souhaité s’exprimer dans nos colonnes, comme le font ailleurs beaucoup de dirigeants d’entreprises pharmaceutiques qui exercent dans différents domaines thérapeutiques. Nous pouvons même parler de langue de bois alors même que nous savons, professionnels de santé recevant leurs représentants ou participants à des congrès avec les fameux sympos-labo et autres communications d’experts mandatés, qu’ils ont probablement beaucoup à communiquer sur le sujet, du moins on pouvait l’espérer.
Non réponses
Pour Bouchara et son directeur général, Olivier Verstraete, nous n’avons eu pour toute réponse que : « En tant que laboratoire commercialisant un médicament de substitution, l’amélioration de la santé de ces patients est un enjeu majeur pour nous. Nous travaillons depuis de nombreuses années avec les intervenants en addictologie et les autorités de santé pour que chaque patient puisse bénéficier du traitement le plus adapté pour lui et dans les meilleures conditions de sécurité possibles. Notre rôle est aussi d’essayer d’améliorer, comme dans de nombreuses autres pathologies, la palette de traitements disponibles. Sur ce point, nos échanges avec les autorités de santé ne peuvent être communiqués, conformément à la règlementation française. De nombreux experts publient des recommandations de bon usage des traitements de substitution visant à l’amélioration de leur utilisation. L’ANSM a également entamé une importante réflexion le 21 juin sur les questions que tu nous proposes (accès et sécurité des MSO, entre autres). Nous attendons leurs conclusions et nous tiendrons à leur disposition pour les accompagner dans la mise en place de leur plan d’actions ».
Donc pas d’opinion (à nous donner en tous cas) sur la place de la réduction des risques dans la mise en œuvre des TSO ni sur la place actuelle et à venir de la méthadone, vue de l’entreprise et de ses dirigeants !
Même son de cloche côté Mundipharma, nouvel acteur du champ de l’addiction qui est attendu pour la mise sur le marché d’une nouvelle présentation de buprénorphine + naloxone (Zubsolv©) et d’un kit naloxone (Nyxoid©), médicaments tous deux présentés dans cette publication.
Son représentant est resté muet (ou sourd) à nos questions qui n’impliquaient pas forcément des confidences sur la nature des discussions que la firme entretient avec les Autorités de Santé : « Les médicaments pour lesquels Mundipharma a obtenu une Autorisation de Mise sur le Marché n’ont pas encore été évalués par la Commission de la Transparence. Le calendrier de leur mise à disposition auprès des professionnels de santé et des patients dépend en partie du résultat de ces travaux. En ce qui concerne vos autres questions, et compte tenu du fait que l’expertise de Mundipharma en addictologie est à ce jour moindre que celles des autres Laboratoires impliqués, nous nous rangeons à leurs positions. »
Nous conseillerions volontiers à Mundipharma et à ses dirigeants et représentants, d’acquérir rapidement une expertise en addictologie afin de répondre aux questions des professionnels de santé, sans se ranger derrière les firmes concurrentes.
En attendant cette expertise à venir, voici ce qu’on peut lire sur le site de Mundipharma : Addiction is a complex, relapsing, chronic disease, which can carry serious health and social consequences. The Mundipharma network of independent associated companies has been working in addiction medicine since 1999, with a particular emphasis on heroin dependency. We understand well the impact this condition has on patients, their families and wider society. We have also amassed decades of first-hand experience in the science of opioid-based medication, which gives us an excellent base from which to deliver high-quality medicines in this area. Our efforts in addiction medicine have already resulted in making an opioid agonist treatment available. Our ambition is to provide a broader range of therapeutic options, giving patients the best possible chance to overcome their personal challenges in heroin dependence. At the same time, we will continue to work with payers, policy experts and patients to drive improvements across the addiction therapy ecosystem in Europe. We will also promote further education of healthcare professionals who are working to support people living with opioid dependency.
Comme on peut le lire ici, il est fait état de plusieurs décennies d’expérience dans le domaine de l’addiction, avec un intérêt particulier pour la dépendance à l’héroïne. Nous voilà donc rassurés d’autant qu’ils annoncent vouloir promouvoir dans le futur la formation des professionnels de santé au contact des usagers. Notons aussi que Mundipharma met à disposition une morphine à longue durée d’action, Sevre-Long©, qui est le MSO le plus prescrit en Autriche, devant la méthadone et la buprénorphine haut dosage.
Les mauvaises langues (que nous ne sommes pas) diront qu’effectivement Mundipharma a acquis une bonne connaissance de l’addiction aux opioïdes, en mettant sur le marché nord-américain l’Oxycontin© dans les conditions que l’on connaît, conditions jugées désormais responsables de l’épidémie d’addiction qui sévit aux Etats-Unis et ses dizaines de milliers de morts chaque année. A ce sujet, on peut relire l’article de Bertrand Lebeau Leibovici ou celui de Slate. Ou encore les trois articles publiés dans ASUD journal sur le même sujet en janvier par Bertrand Lebeau Leibovici, Jean-Maxence Granier et Fabrice Olivet : « Opioïdes et paniques morales » , « Crise des opioïdes : alerter sans hurler avec les loups ! » et « Opioïdes de crise ou crise des opioïdes« .
Côté Camurus, guère plus de résultat. Sa directrice générale Europe du Sud, Hélène Thomas, nous a précisé : « Je vous remercie pour l’intérêt que vous portez à notre spécialité et notre laboratoire, mais Camurus ne sera pas en mesure de participer à cette interview. Le Comité des médicaments à usage humain CHMP de l’agence européenne des médicaments a émis un avis favorable le 21 septembre dernier à l’approbation de Buvidal® (buprénorphine) solution injectable à libération prolongée pour le traitement de la dépendance aux opioïdes. L’autorisation finale de mise sur le marché de Buvidal® par la Commission européenne est attendue pour la fin de l’année. N’ayant pas encore obtenu cette autorisation, ni un avis de la Commission de Transparence de la HAS, nous ne pouvons pas à ce stade nous exprimer sur notre spécialité, ni communiquer de calendrier de mise à disposition. Concernant les autres questions, Camurus estime que c’est le rôle des experts, des commissions et des autorités réglementaires (ANSM, HAS…), des sociétés savantes, fédérations, associations d’émettre et publier des avis et des recommandations quant à la prise en charge. Comme indiqué par nos collègues, nous nous référons à ces derniers, et nous nous tiendrons à leur disposition. »
Donc, là-aussi, pas d’opinions propres sur les sujets et questions qui traversent le milieu de l’addiction et de la prise en soin des usagers de drogues alors que cette firme se prépare à arriver sur le marché des MSO.
Sur ce lien, plus d’informations sur l’avis positif de Buvidal, donné au niveau européen :
- European medicines agency. Buvidal (buprénorphine). Aperçu de Buvidal et pourquoi il est autorisé dans l’UE
Deux représentants des firmes ont répondu, plus ou moins, à nos questions. Pour les autres, nous tenterons, faute de mieux, de répondre à leur place, comme nous l’avons déjà fait ci-avant, en utilisant le ‘matériel’ disponible sur Internet.
Commentaire de Fabrice Olivet, directeur d’Asud, que nous avions également sollicité en parallèle :
L’industrie pharmaceutique représente un acteur de premier plan dans le paysage compliqué de la consommation de substances psychotropes licites ou illicites. La puissance financière qui caractérise ce secteur est un sujet en soi. Le médicament est la branche du capitalisme la plus lucrative, celle qui draine les profits les plus significatifs dans le concert mondial. Ne pas tenir compte de cette influence est au mieux stupide, au pire criminel, comme le démontre aujourd’hui l’historique de l’épidémie de surdoses d’opioïdes qui sévit aux Etats Unis et au Canada. Il est donc parfaitement légitime d’intégrer ces acteurs au débat général sur les politiques de drogues. Mieux, il serait périlleux et malsain de ne pas le faire, de la même façon qu’il serait périlleux et malsain de ne pas insérer cette parole dans une organisation scrupuleuse de la transparence de ses impératifs commerciaux. Il s’agit d’un sujet nouveau et curieusement anxiogène pour des acteurs français souvent prompts à se désigner comme exemplaires auprès de nos interlocuteurs africains pas exemple. C’est pourquoi ASUD ne peut que saluer fraternellement cette initiative du Flyer qui devrait être plus souvent imitée, ce qui aurait comme effet d’habituer également les acteurs industriels de l’addictologie à une parole publique et non plus réservée aux coulisses.
Questions et (quelques) réponses
Voici donc les questions que nous avons soumises aux firmes pharmaceutiques et à leurs représentants :
Question 1 : Quelles sont vos échéances en termes de mise sur le marché des médicaments autour de l’addiction aux opioïdes (naloxone, buprénorphine, méthadone…). Quand seront-ils disponibles pour nos patients ?
Réponse de Thierry Kin, Laboratoires Ethypharm : « Pour Orobupré©, nouvelle forme de buprénorphine (lyophilisat oral), nous avons eu le retour de la HAS (avis de la Commission de Transparence) cet été et obtenu le prix en septembre 2018. Nous n’attendons plus que la parution au JO pour mettre le médicament sur le marché. A priori, si tout se déroule comme prévu, cela pourrait arriver courant novembre. Les MARR (Mesures Additionnelles de Réduction du Risque) ont été acceptées par l’ANSM. Elles consisteront à diffuser notamment une brochure d’information à destination des patients, commune à tous les laboratoires qui commercialisent une buprénorphine haut dosage. Cette brochure est orientée sur les risques de mésusage inhérents à la buprénorphine. Au-delà de celle-ci, l’enjeu pour nous est d’informer les professionnels de santé qu’Orobupré© n’est pas interchangeable avec d’autres formes de buprénorphine haut dosage. En raison de sa dissolution plus rapide (environ 15 secondes) et d’une absorption elle-aussi plus rapide, la biodisponibilité peut potentiellement être différente et nécessiter une adaptation de posologie en cas de switch d’un traitement par BHD sublingual vers Orobupré, ou l’inverse d’ailleurs quand le médicament sera disponible. Concernant Prenoxad©, kit intramusculaire de naloxone, nous venons de soumettre le dossier à la Commission de Transparence pour obtenir le remboursement (nécessaire pour le remboursement en pharmacie d’officine quand le kit sera prescrit) et l’agrément aux collectivités (nécessaire pour la diffusion en CSAPA, CAARUD et hôpitaux). Nous pourrons espérer obtenir le prix une fois que nous aurons le retour de la HAS. L’échéance est un peu plus lointaine, probablement en début d’année 2019. Il y aura déjà sur le marché au moins un kit nasal de naloxone, mais nous pensons qu’il y a de la place pour un kit intramusculaire. Selon nous, il appartient en effet aux usagers de choisir quel kit ils veulent avoir sur eux, après avoir été informés de l’existence et des modalités d’administration de la naloxone avec les 2 types de kit. Leur choix final déterminera la diffusion des kits, selon le mode d’administration. »
Commentaires du Flyer : Pour avoir un avis objectif et non promotionnel sur le médicament Orobupré©, on peut se référer à l’avis de la HAS. Il a obtenu un niveau de SMR modéré et un ASMR 5, signifiant l’absence de service médical rendu par rapport à l’existant.
Réponse de Bassel Amer, Indivior : « Indivior est une compagnie dédiée au développement des traitements des addictions. Notre vision est que tous les patients dépendants aient accès à des soins et à une prise en charge de qualité. Aujourd’hui nous commercialisons des traitements de la pharmacodépendance aux opioïdes ainsi qu’un traitement d’urgence des overdoses opioïdes. Nous continuons à développer de nouvelles thérapeutiques qui ciblent les addictions et leurs comorbidités. Pour les médicaments qui n’ont pas encore d’AMM, la réglementation Française ne permet pas aux industriels d’en parler publiquement. »
Commentaires du Flyer : M. Amer a poursuivi en nous invitant « à contacter les autorités réglementaires compétentes (ANSM) à ce sujet », ce qui bien sûr n’était pas le projet de cet article. Ce qui est de notoriété publique est qu’Indivior a développé une forme dépôt de buprénorphine (injection sous-cutanée pour 1 mois de traitement) qui répond au nom de Sublocade© et qui vient d’être commercialisée aux États-Unis (avec peu de succès semble-t-il). Cette forme devrait être disponible en France dans les mois qui viennent si on en croit le bruit qui est fait autour de cette nouvelle modalité. Pour en savoir plus sur cette forme, consultez le site Psychoactif. Ce qu’aurait pu aussi nous dire utilement M. Amer, c’est que désormais leur médicament Subutex© peut être prescrit à une posologie de 24 mg/jour (septembre 2018) et que leur kit naloxone ne sera pas disponible en pharmacie (pas de remboursement SS), mais disponible auprès des hôpitaux, CSAPA et CAARUD au prix de 35 euros, ce qui est une excellente nouvelle. Informations qu’Indivior nous avait demandé de relayer fin septembre. Ce n’est pas une information confidentielle pouvant mettre en danger le représentant de la firme, celle-ci ayant fait l’objet par ailleurs d’une campagne-presse.
Commentaires de Fabrice Olivet :
Comme je l’ai indiqué lorsque la proposition fut faite à ASUD de commenter la publication du Flyer, toutes ces questions ont fait l’objet d’un débat à l’ANSM lors de la journée organisée par la commission des stupéfiants sur la prévention des surdoses de MSO, puis plus récemment lors de la dernière commission. Mes propos sont donc largement inspirés de ceux que j’ai exprimés en tant que représentant de l’association d’usagers ASUD et membre de la Commission Nationale des Stupéfiants et Psychotropes.
Les commentaires ou même l’absence de commentaires qui figurent dans la publication du Flyer appellent deux réflexions :
La première est relative aux nouvelles molécules et aux nouvelles galéniques de molécules déjà existantes sur le marché, la seconde se rapporte à la naloxone et plus largement à la prévention des surdoses d’opioïdes en France.
Les MSO ont une diffusion massive en France depuis 1995-96 grâce à la prescription mais aussi et surtout, grâce à une diffusion hors prescription de ces médicaments. C’est l’un des tabous du système français mais tous les observateurs honnêtes savent que la grande majorité des usagers qui entament un TSO, le font d’autant plus volontiers qu’ils connaissent déjà ces molécules consommées en dehors du système de soins. La rançon de ce succès planétaire, ce sont effectivement les risques de surdoses. Le canal de diffusion qui a sans doute été majeur dans le succès remporté par les TSO auprès des usagers est sans doute celui qui aboutit à placer la méthadone en tête des surdoses mortelles constatées par l’étude DRAMES 2016. Il convient d’insister sur le fait qu’il s’agit d’une méthadone, vendue ou échangée au marché noir ou bien cédée à titre gracieux. La méthadone qui tue n’est donc pas celle qui est prescrite mais celle qui est (re)vendue.
Le 21 juin 2018, l’ANSM a donc organisé une journée de réflexion sur la prévention des surdoses d’opioïdes prescrits comme TSO. Dans cette journée comme dans la présentation des recommandations faites par les différents intervenants, l’accent est mis sur les personnes lourdement dépendantes qui seraient victimes de surdoses. Or, ce sont probablement ces personnes qui paradoxalement, sont le mieux protégées contre une overdose du fait de leur tolérance importante aux opioïdes, tolérance qui va jouer le rôle d’armure anti-overdoses. Or, ce sont précisément ces populations qui vont constituer le plus directement la cible des outils mis en place pour lutter contre les surdoses. Les victimes potentielles les plus vulnérables sont les usagers et ex-usagers de drogues, faiblement ou non-dépendants aux opiacés, qui sont les plus susceptibles de subir une surdose dont l’issue sera fatale. De qui s‘agit-il ? De jeunes poly-usagers naïfs d’opiacés, consommateurs occasionnels, ex-usagers sortant de cures ou de prison, « relaps » qui replongent une seule fois après des années d’abstinence et, plus généralement, tous les intermittents du spectacle de la dope achetée sur internet.
Ces deux remarques de contexte positionnent l’ensemble de mon commentaire autour d’un point fort. Si une action soutenue par les pouvoirs publics doit se mettre en place pour lutter activement contre le risque de surdoses opioïdes, elle doit s’appliquer prioritairement à la prescription et la délivrance en médecine de ville plutôt que de cibler la population des CSAPA-CAARUD. Si un message doit être élaboré pour prévenir le risque d’overdoses en France, il doit être conçu et délivré à la population en général, pour une fois appréhendée pour ce qu’elle est, une part de nous-mêmes, nos enfants, nos collègues, nos voisins. Qu’il s’agisse de drogues prescrites ou achetées clandestinement, le problème est toujours le même : élaborer un message qui soit audible de la part de gens concernés et non plus seulement destiné à rassurer des institutions ou des professionnels du soin. A cet égard, l’impossibilité de proposer Nalscue? en pharmacie de ville est un mauvais coup porté à la prévention des overdoses en France.
En ce qui concerne les nouvelles galéniques de BHD, très orientées sur une administration dite « supervisée », elles semblent avoir été pensées pour lutter contre les détournements et le mésusage, une finalité qui rappelle fâcheusement l’échec programmé de Suboxone®. Peu de chance de succès auprès des usagers de TSO, hormis des « niches » comme celles des candidats à la sortie du traitement par exemple.
C’est ne pas comprendre grand-chose au terme-même de substitution que de proposer un médicament que les patients sont censés « oublier » pendant une semaine ou un mois. Se passer du rituel de la prise quotidienne (ou bi voire tri-quotidienne) revient à considérer que les usagers de Sublocade? ou autres, sont déjà « guéris » ou presque, qu’ils n’ont plus besoin de ce rituel de la prise et de l’attente de la sensation qui suit, moment essentiel qui fait littéralement « substitution » à la prise de drogues. Comme cela est rappelé par le Flyer, la réticence à utiliser le « S » de substitution – TSO – pour lui préférer le « T » de Traitement – TAO – en dit long sur le déni qui caractérise une partie du secteur (1). Le mythe de la maladie chronique récidivante, assimilable au diabète, à l’hypertension ou à la dépression, continue de faire rêver de nombreux addictologues, trop heureux de fournir ainsi un argumentaire politiquement correct aux industriels comme aux politiques, toujours anxieux à l’idée de passer pour des « dealers en blouse blanche ». Sur ce plan, rien n’a véritablement changé depuis les premiers débats de la Réduction Des Risques rappelés ces temps-ci par l’actualité éditoriale. Les seuls à ne pas jouer le jeu de la maladie chronique sont les usagers.
Dommage pour eux !
Question 2. La buprénorphine a été positionnée en traitement de première ligne dans une publication récente (Dematteis et al. [1]). Qu’en pensez-vous au regard de la situation française ?
Réponse de Bassel Amer, Indivior : « A cette deuxième question, le dirigeant d’Indivior nous a invités à contacter le Pr Dematteis (?), nous procurer la publication (!), voire nous connecter avec lui (!!). Nous ne l’avons pas contacté bien sûr. Nous connaissons parfaitement la publication du Pr Dematteis et al. puisqu’elle était l’objet de notre question et, plus généralement, ses positions en tant qu’expert, très écoutées et respectées dans le milieu de l’addictologie. A nouveau, nous pensions qu’un dirigeant d’une firme qui commercialise des MSO depuis plus de 20 ans pouvait avoir un avis sur cette question sans déroger au droit de réserve des firmes pharmaceutiques. »
Réponse de Thierry Kin, Laboratoires Ethypharm : « Nous avons effectivement pris connaissance avec grand intérêt de la publication que vous citez. Elle est signée de grands noms de l’addictologie française et européenne. Même si ce n’est pas un consensus formel, c’est la position d’experts incontournables dans le domaine des MSO. Cela dit, la France a une histoire singulière avec la buprénorphine. Elle est le premier pays où un médicament à base de buprénorphine haut dosage [Ndlr : Subutex©] a été mis officiellement à disposition des usagers en 1996, il y a plus de 20 ans. Il a connu une progression très rapide en termes de diffusion, comme nulle part ailleurs. Cette diffusion a été portée par les médecins généralistes et les pharmaciens d’officine alors que le milieu spécialisé, globalement sceptique sur les médicaments de substitution (hormis les militants de la première heure) se voyait confier la mise en place des traitements par la méthadone.
La mise en place de ce dispositif reposait sur l’idée que la buprénorphine était moins dangereuse (effet-plafond = risque minoré d’overdose) et que la méthadone nécessitait un cadre de prescription plus sécurisé. C’est ainsi que naturellement s’est imposée l’idée d’un traitement de première intention en médecine de ville avec la buprénorphine haut dosage, et la méthadone prenait sa place en seconde intention. Ceci, bien avant la publication de Dematteis et al.. Mais peu à peu, les choses sont devenues moins simples que cela. Les médecins du milieu spécialisé se sont mis à prescrire de la buprénorphine à des patients pour lesquels ce traitement leur semblait plus indiqué et les médecins généralistes ont posé l’indication de la méthadone pour des usagers qui se présentaient dans leurs cabinets. Pour certains, ils ont adressé leurs patients vers des circuits courts de primo-prescription avec relais très rapide en ville. En 2008, la HAS, dans un avis sur la place d’un nouveau médicament de substitution [Ndlr : Suboxone©] dans la stratégie thérapeutique définissait des indications préférentielles qui semblent toujours très pertinentes. En réalité, les médicaments de substitution sont prescrits en fonction de la situation clinique mais surtout de la demande et des attentes des usagers. Le médecin doit certes informer le patient sur différents aspects liés aux médicaments mais, au final, l’adhésion au traitement dépend du choix par le patient lui-même, en fonction de ses expériences passées et à venir. La notion de première intention ou de seconde intention ne me semble pas applicable ici, comme elle peut l’être en antibiothérapie ou en cardiologie.
D’ailleurs, dans de nombreux pays, comme en Belgique, Suisse et Royaume-Uni par exemple, la méthadone est le MSO de première intention, la buprénorphine étant plutôt en seconde intention. Ce qui montre que l’histoire conditionne également la place respective de ces médicaments. »
Commentaire du Flyer : L’avis de la Commission de Transparence de Suboxone© en 2008, définissait les indications préférentielles de la façon suivante (par rapport à la méthadone) :« Actuellement, les différences de règles de prescription et les disparités dans l’offre de soins influent encore beaucoup sur le choix du médicament de substitution aux opiacés par les patients et les prescripteurs.
Cependant, la méthadone serait plus particulièrement adaptée en cas de :
- dépendance sévère,
- difficultés à renoncer à l’injection,
- comorbidité psychiatrique,
- polyconsommation (alcool, BZD, cocaïne, etc.),
- situation de grande précarité sociale,
- patients pour lesquels un traitement antalgique morphinique est nécessaire.
Ces indications préférentielles sont assez proches de ce qu’avait établi la Conférence de Consensus en 2005[2]. »
Question 3. Comment voyez-vous évoluer la diffusion des médicaments de substitution en France ? Vers quel mode d’administration, sous forme d’associations ?
Sur cette question, les représentants des firmes n’ont pas souhaité répondre à l’exception d’un seul.
Réponse de Thierry Kin, Laboratoires Ethypharm : « Pendant des années, la voie sublinguale a été la voie d’administration exclusive de la buprénorphine. On sait désormais que d’autres voies sont en cours de développement et devraient arriver prochainement sur le marché. Un article publié dans votre revue faisait un état des lieux de ces nouvelles formes. Elles visent, selon les différentes galéniques, soit à dissuader du mésusage, soit à améliorer le confort de prise et, pour toutes, augmenter la biodisponibilité de la molécule. Les associations de principes actifs (buprénorphine + naloxone) n’ont pas eu le succès escompté en raison notamment d’un scepticisme de la part des usagers et de leurs médecins et peut-être aussi d’une arrivée tardive, plus de 10 ans après la buprénorphine seule. Quoi qu’il en soit, et il en sera probablement de même pour les formes dépôt : l’acceptabilité par les usagers sera un déterminant essentiel à la diffusion des nouveaux médicaments sous toutes les formes. L’idée d’avoir dans l’organisme une molécule pendant une semaine ou un mois peut séduire une certaine catégorie d’usagers, mais probablement pas tous. Ce n’est pas un avis, seulement une opinion personnelle. Ce sont les représentants des usagers qui sont les mieux placés pour répondre au nom des usagers qu’ils représentent. D’autre part, la HAS et l’ANSM donneront le moment venu leurs indications sur la place de ces formes dans la stratégie thérapeutique. »
Commentaires du Flyer : Les dirigeants d’Indivior et de Camurus auraient eu probablement beaucoup à dire sur la place qu’ils entrevoient pour les formes dépôt de buprénorphine (Sublocade©, Indivior et Buvidal©, Camurus) mais ont préféré invoqué leur droit de réserve. Qu’à cela ne tienne, il suffit d’aller sur le site d’une des 2 firmes pour être éclairé sur le positionnement de leurs futurs médicaments.
Pour CAM2038, baptisé Buvidal©, voilà ce qu’on peut lire sur le site public accessible à tous :
CAM2038 has the potential to free patients from the burden and stigma associated with the daily, often supervised, distribution and administration of medication. The investigational products will be provided in prefilled syringes with thin needles, designed for convenient administration by healthcare personnel to ensure proper delivery and treatment compliance, and to minimize the risks of diversion, abuse, misuse, and accidental pediatric exposure. By reduced dosing frequency and thereby costs of treatment under supervision, as well as by improved treatment compliance, CAM2038 also has the potential to generate substantial savings for healthcare and society.
CAM2038 – Key target attributes :
- Improved treatment adherence
- Reduced frequency of administrations – from 365 times to 12 times per year
- Minimized risk of diversion and misuse
- Eliminates risk of accidental pediatric exposure
- Flexible dosing and adjustable duration allow individualized therapy in all treatment phases
- Blocks the effects of illicit opioids
Il s’agit donc ici d’améliorer la compliance à la buprénorphine, limiter la fréquence d’administration, le mésusage, les accidents pédiatriques et bloquer les effets des opioïdes illicites si le patient devait y recourir. On peut lire aussi « de libérer les patients de la stigmatisation et du poids de la prise quotidienne du médicament. »
On voit d’ores et déjà des leaders d’opinion, ceux que nous avions qualifiés avec une pointe d’ironie et d’amitié d’« experts-aidants » dans un article précédent, s’investir dans la promotion de ces nouveaux traitements. Dans le passé, d’autres s’étaient très investis dans la promotion de Suboxone© avec le succès que l’on sait. Il serait sage de faire preuve de retenue pour ce qui est de l’avènement des buprénorphine dépôt. Sublocade© a été lancé aux Etats-Unis et le moins que l’on puisse dire est que le succès n’est pas au rendez-vous. L’action à la bourse de Londres a dévissé, en lien notamment avec des ventes 5 fois inférieures à ce que la frime prévoyait, alors que la situation nord-américaine (en termes d’épidémie d’addiction) et l’approche médicale dominante faisaient des Etats-Unis une terre d’accueil privilégiée pour Sublocade©. Donc, annoncer que ces formes dépôt représentent le futur des traitements par buprénorphine en France, comme d’autres l’ont fait il y a quelques années pour Suboxone©, est très anticipé. Ce sera peut-être le cas un jour, mais c’est certainement imprudent de s’y compromettre trop tôt (voir la dépèche Reuters, « Indivior slashes revenue outlook for Sublocade, shares tank », SEPTEMBER 26, 2018).
Question 4 : Comment réduire le nombre d’overdoses en France, aux opiacés en général, et plus spécialement aux médicaments de substitution ?
Réponse de Bassel Amer, Indivior : « Ces questions ont justement fait l’objet d’une réunion spéciale le 21 juin dernier sous l’égide de l’ANSM (Journée d’échange partenarial de la Commission des Stupéfiants et psychotropes du 21 juin 2018). Les échanges de cette journée sont disponibles en enregistrement vidéo sur le site de l’ANSM. Faire référence dans ton article à ce travail d’experts et des sociétés savantes serait plus objectif et plus éclairant pour tes lecteurs que l’opinion personnelle des laboratoires pharmaceutiques impliquées dans ce domaine. Par ailleurs, ce travail sera à priori suivi de la mise en place d’un plan d’action national dont l’objectif est de réduire le nombre d’overdoses opioïdes en France et l’amélioration de la prise en charge en général. »
Commentaire du Flyer : Là-aussi, sans présager des conclusions de la Commission de l’ANSM, nous avions pensé que, commercialisant des médicaments de substitution et, pour 3 d’entre eux, des kits naloxone (actuellement ou à venir), les dirigeants des firmes auraient aimé donner un avis sur le sujet, ce que les lois ne leur interdisent probablement pas et, à nouveau, les représentants des firmes et leurs porte-voix ne s’en privent pas au quotidien.
Réponse de Thierry Kin, Laboratoires Ethypharm : « Je pense qu’il y a désormais un consensus largement exprimé sur ce sujet, notamment lors de la journée du 21 juin 2018, présidée par Nicolas Authier dans le cadre d’une Commission Nationale des Psychotropes et Stupéfiants et entièrement dédiée à ce thème. L’accès large aux traitements de substitution opiacée et aux outils de réduction des risques a fait largement la preuve de son efficacité en France. Même s’il existe quelques ombres au tableau (revente, overdoses, détournement de la voie d’administration), le bilan est PLUS que globalement positif.
Il suffit de jeter un œil attentif sur ce qui se passe dans les pays où les traitements de substitution ne sont pas disponibles (ou trop peu) pour s’en convaincre : le taux de mortalité dans la population d’usagers y est considérable (suicides, overdoses, etc.) ainsi que le taux de séroconversion et la criminalité associée. Donc, pour réduire le nombre d’overdoses, il semble indispensable en premier lieu de maintenir, au moins dans l’état, l’accès aux médicaments de substitution aux opiacés ; voire le développer si localement, il y a un défaut dans cet accès. Celui-ci a permis à la France d’avoir un taux d’overdoses plutôt bas comparé à de nombreux pays voisins, comme le Royaume-Uni ou l’Espagne, comme le montre le dispositif DRAMES chaque année. Et, toujours, penser à ceux qui ne sont pas aujourd’hui dans le soin, en leur proposant des solutions qui feraient qu’ils y entrent. Des pays mettent à disposition une substitution par héroïne injectable qui a largement fait la preuve de son efficacité.
En second lieu, il faut mettre à disposition des usagers à risque des kits naloxone, dans les endroits qu’ils fréquentent, CAARUD, CSAPA, services hospitaliers, prisons et pharmacies d’officine. Il faut probablement aussi faire voter une loi du « bon samaritain », qui permettra d’éviter qu’un témoin (lui-même usager) qui appelle les secours pour un usager qui fait une overdose, ne soit ennuyé par la police ou la justice. Ce type de loi, je crois, a été adoptée au Canada. Concernant le niveau des overdoses en France, la situation étant sans commune mesure avec ce qu’il se passe dans certains pays d’Amérique du Nord voire d’Europe, la diffusion des kits de naloxone doit probablement être large mais ciblée vers les usagers les plus à risque. La Commission des Stupéfiants et Psychotropes répondra certainement très précisément à cette question. Et pour finir, la diffusion même des kits et la sensibilisation (des usagers et des professionnels) qui l’accompagne, aura probablement un impact direct sur le nombre d’overdoses. »
Question 3 : Quelle est la place de la réduction des risques dans les traitements de substitution (TSO) ?
Le Flyer : Sur cette question, il est de notoriété que certaines ‘écoles’ s’affrontent, y compris dans les firmes pharmaceutiques. Entre réduction des risques et traitement de l’addiction, voire de l’addict lui-même, tout le monde n’a pas la même position quant à la place des traitements. C’est bien sûr le cas aussi dans le milieu. La rédaction d’un rapport de la FFA en 2016 avait pourtant donné le ton.
Réponse de Thierry Kin, Laboratoires Ethypharm : « En ce qui me concerne, réduction des risques et TSO sont indissociables. La réduction des risques ne doit pas être le parent pauvre de l’addiction ni un préalable au traitement pour des usagers pas encore prêts, et le traitement de substitution ne peut se priver d’une approche RdR car c’est cela qui est le plus efficace. Le tournant a probablement été la publication, au milieu des années 2000, d’une étude hollandaise (Van Den Berg) montrant clairement qu’associer la mise à disposition de seringues stériles à un traitement par la méthadone à une bonne posologie était plus efficace sur la séroconversion au VIH et au VHC qu’une des 2 méthodes isolément. Les professionnels de terrain savaient intuitivement ce que l’étude a démontré. Dans un autre domaine, celui de la dépendance tabagique, la vapoteuse est elle-aussi une approche de type RdR et cette position lui a valu d’ailleurs de nombreuses critiques, pour cette raison. Il faut avoir à l’esprit que les MSO, méthadone, buprénorphine, voire héroïne doivent leur diffusion et leur reconnaissance au VIH, VHB et VHC dont la prévalence était élevée chez les usagers de drogue. Mais comme le disait le regretté Jean-Pierre Lhomme, il faut ‘séronégativer’ la RdR et faire en sorte qu’elle s’attaque aux autres risques que prennent les usagers. Le risque d’overdose, de marginalisation ou de stigmatisation, le risque judiciaire, etc. doivent être pris en compte dans une stratégie globale de prise en soin. Mais il faut reconnaitre que, en dehors du milieu spécialisé et du cercle des militants en ville (certains médecins généralistes et pharmaciens d’officine investis), cette approche ‘réduction des risques’ n’est pas toujours comprise. Les débats, parfois stériles, sur les Salles de Consommation à Moindre Risques montrent à quel point le concept de réduction des risques n’a pas été bien intégré dans notre société et sûrement insuffisamment expliqué… »
Commentaire du Flyer : A nouveau, pas d’avis (donné) sur cette question, venant des autres représentants des firmes, qui n’impliquait pas, là encore, d’informations ‘interdites’ ou confidentielles sur leurs médicaments.
Commentaire de Fabrice Olivet :
Autant de questions qui mériteraient une remise à plat du système par une vraie communication nationale sur l’utilisation de médicament opioïdes, mais aussi sur la réalité de l’addiction opiacée, deux sujets qui ne sont divergents que pour les firmes. Attention, outre-Atlantique, cette divergence artificielle est à l’origine d’une catastrophe historique, d’origine iatrogène, à côté de laquelle l’épidémie de sida apparait comme une péripétie statistique en nombre de morts constatés.
Quelles solutions ?
Mettre en place une campagne visant à lutter contre la non-prescription et la non délivrance de TSO chez les professionnels de « ville », une campagne d’information grand public sur la réalité du système des prise en charge de la dépendance aux opiacés en France et notamment ses succès indéniables. Tout cela avant que les ennemis politiques de la réduction des risques ne s’emparent du nombre de morts par surdoses de TSO, comme ils s’emparent déjà des morts par surdoses de médicament codéinés en mélangeant le dossier addiction et le dossier anti douleur, des sujets qui sont intrinsèquement mêlés. Depuis deux mille ans au moins, l’humanité utilise des opioïdes pour, indifféremment, ne plus avoir mal, dormir ou rêver. C’est l’un des grands non-dits de la catastrophe de l’épidémie nord-américaine, un silence qui a des explications anthropologiques spécifiquement étasuniennes. Un tel précédent mérite amplement de considérer préventivement un hypothétique épisode européen.
Une solution globale : organiser une nouvelle conférence de consensus sur les TSO et la prescription d’opioïdes pour pallier à l’ignorance de la population, usagers compris. Un tel évènement couplé à une première campagne nationale d’information grand public sur les TSO et l’usage d’opioïdes aurait toute sa place dans une société française prompte à enfourcher tous les chevaux fous sécuritaires dès que le mot « drogues » est prononcé.
Pour conclure
On voit qu’il est difficile d’obtenir des informations auprès des dirigeants des firmes pharmaceutiques. C’est beaucoup plus facile au contact de leurs collaborateurs qui fréquentent les structures de soin ou lors des congrès, au cours de discussions informelles.
Nous avons essayé ici de donner un espace de parole à ces dirigeants, lesquels, probablement gênés par des aspects juridiques ou plus simplement discrets sur ce qui pourrait dévoiler leur stratégie, ont été globalement peu bavards à l’exception d’un seul. Peut-être aussi que notre revue n’était pas considérée par eux-mêmes comme un lieu de partage, ce que nous comprenons parfaitement.
Merci à Fabrice Olivet d’avoir mêlé sa parole de représentant d’usagers à celle des représentants des firmes.
Bibliographie
- (1) TSO ou TAO (Traitement de l’addiction aux opioides), pseudo-science ? 4 juin 2018 : https://www.psychoactif.org/forum/t34973-p1-TSO-TAO-Traitement-addiction-aux-opioides-pseudo-science.html
- (2) Maurice Dematteis et al. Recommendations for buprenorphine and methadone therapy in opioid use disorder: a European consensus. Expert opinion on pharmacotherapy 2017
- (3) Conférence de Consensus (Lyon, 23-24 juin 2004), ANAES – FFA